vendredi 12 août 2022

Cinéma - Un “Dodo” grec ébouriffant


Après avoir vu Dodo de Pános H. Koútras, vous pourriez regretter que le réalisateur n’ait pas eu l’envie de transformer ce scénario dense en une mini-série de 5 ou 6 heures. Les 2 heures et 15 minutes semblent un peu courtes pour explorer tous les personnages de ce film choral se déroulant sur les deux jours précédant un mariage dans la grande bourgeoisie grecque.

Exactement dans la bourgeoisie en partie ruinée. Car si Sofia s’apprête à épouser Aris, c’est essentiellement pour remettre sa famille en fonds. Le père, ancien député, affairiste, a tout perdu dans la crise. La mère, ancienne comédienne, ne tourne plus depuis des années. Dans leur luxueuse propriété, sans le moindre sou vaillant, ils préparent le mariage quand un étrange volatile fait son apparition. Un dodo, gros poulet originaire de l’île Maurice, normalement disparu depuis des siècles. D’où vient ce dodo, quel sera son rôle dans le mariage ou l’implosion de la famille ?


La comédie de Pános H. Koútras n’apporte pas de réponses directes mais étrille copieusement toute cette société où l’argent est roi, la magouille une religion et la trahison une sorte de prière quotidienne. De la fille qui hésite à se marier et se donne pour 50 euros à un ouvrier au père qui tente de rapatrier de l’argent sale placé dans une banque en Asie à la mère qui voudrait se racheter une conscience en aidant des réfugiés syriens, ils sont tous très détestables.

Pourtant on les comprend et on les excuse car malgré leur mauvais fond, ils ont conscience qu’il faut absolument aider ce dodo, sorte de miracle de la nature.

Le film est caustique, brillant, ébouriffant, parfaitement interprété. Au point qu’effectivement on aurait aimé passer un peu plus de temps dans cette propriété en compagnie de cette famille et de l’employée russe, de l’homme à tout faire albanais, de l’acteur oublié homosexuel ou du trans amoureux d’un redoutable escroc.

Film grec de Pános H. Koútras avec Smaragda Karydi, Akis Sakellariou, Natasa Exintaveloni

jeudi 11 août 2022

Cinéma - "One Piece – Red" ou quand la japanimation se met à chanter


Manga parmi les plus vendu dans le monde, One Piece fait régulièrement l’objet d’adaptations sur grand écran. Ce film est un peu spécial car il explore un genre peu prisé par les fans de ces histoires fantastiques de pirates : la comédie musicale. Tout débute quand des milliers de personnes se réunissent pour le premier concert de la star Uta. Ses vidéos ont des millions de vues, mais c’est la première fois qu’elle va chanter en live. Luffy et son équipage sont présents.

Le jeune pirate découvre que derrière Uta se cache son amie d’enfance, la fille du pirate Shanks. Tout se complique quand Uta, avec ses compositions, veut transformer le monde. Elle capture toutes les âmes des spectateurs et les asservit. Luffy aidé de quantité d’autres pirates, va lutter contre le démon qui a pris possession d’Uta.

Un film grand spectacle, pour les fans, avec Hoshi dans la version française pour interpréter les chansons d’Uta.

mercredi 10 août 2022

Roman - Duchess, la petite hors-la-loi

Entre thriller, polar et roman social, Duchess de Chris Whitaker est avant un grand roman américain, de ceux qui vous prennent aux tripes avec des personnages qui longtemps vont hanter votre mémoire. Il y a bien évidemment Duchess, l’adolescente qui donne son nom au livre, son frère, Robin et puis Walt, le flic qui tente d’avoir raison contre tout le monde, impuissant dans un monde qui ne tourne plus rond.

L’action se déroule à Cape Haven, une petite station balnéaire de Californie, perchée au bord du Pacifique. Premier drame : une petite fille disparaît. Son corps est retrouvé par Walt, encore enfant. Sissy est morte par la faute de Vincent King, le meilleur ami de Walt et amoureux de Star, la sœur de Sissy. Dans ce petit paradis, ce drame va durablement marquer les esprits. La suite du roman se déroule 30 ans plus tard. Vincent va sortir de prison. Walt est devenu le policier municipal de Cape Haven et Star, alcoolique, a deux enfants, Robin et Duchess. Cette dernière fait office de maman de substitution. Dure au mal, déterminée, elle s’accroche à une certitude : ses ancêtres étaient des hors-la-loi. Elle aussi sort du cadre, provoque, dynamite tout ce qui l’approche : « Duchess préférait Cape Haven en hiver, quand une certaine honnêteté décapait le vernis et laissait apparaître une petite ville ordinaire. Elle détestait les étés, longs, beaux, affreux. »

Ce roman propose le meilleur portrait d’une adolescente depuis très longtemps. À la psychologie compliquée. « Le bruit flottait jusqu’à elle et lui glissait dessus. Elle avait cette capacité à se sentir complètement seule sur une plage noire de monde ou dans une classe remplie d’élèves. » Duchess qu’on aimerait pouvoir aider, protéger. Mais c’est une boule de nerfs qui n’a plus confiance en personne. Duchess, qui tente de sauver sa mère du naufrage et de préserver son petit frère. Mais le retour de Vincent King va provoquer un nouveau drame. Le roman prend alors une dimension supplémentaire dans la douleur.

« Duchess » de Chris Whitaker, Sonatine, 23 €

mardi 9 août 2022

BD - Cow-boy ou dessinateur ?


Quand on est dessinateur de BD comme Thierry Martin, on a l’imagination débordante. Loin de se voir comme un sédentaire scotché à sa planche à dessin, il a plutôt l’impression d’être un cow-boy vivant de formidables aventures dans l’Ouest sauvage. 

Mais au lieu de capturer des méchants ou de sillonner le désert sur son mustang, il gronde ses enfants turbulents et va faire des courses pour sa femme qui elle a l’apparence d’une super-héroïne.

Ces gags et histoires courtes, parus dans Fluide Glacial, sont délicieusement absurdes et poétiques. Cela donne envie au lecteur de lui aussi réinventer son quotidien trop classique. Alors pour vous, ce sera polar ou fantasy, western ou saga historique ?

« La famille selon Jerry Alone », Fluide Glacial, 12,90 €


lundi 8 août 2022

Polar - Le vol devient un art


Il se considère comme le meilleur dans sa spécialité. Riley Wolfe, cambrioleur de son état, n’est pas modeste. Mais il se trouve qu’il est effectivement le plus grand voleur de tous les temps. C’est ainsi que l’a imaginé Jeff Lindsay, l’auteur de ce polar ingénieux et magistralement mené, malgré une intrigue outrageusement compliquée. Riley, après avoir subtilisé une statue de plusieurs tonnes dans le premier chapitre, voudrait dérober quelque chose d’encore plus spectaculaire. Il va se lancer un défi : subtiliser le plus gros diamant du monde.

Le problème, c’est qu’il est dans un musée à Téhéran, surveillé par les Gardiens de la Révolution. Quand il apprend que le gros caillou va être exposé dans un musée de New York, Riley élabore son plan pour entrer définitivement dans la légende de la cambriole.

On apprécie particulièrement le caractère de ce voleur. Prétentieux, certes, mais il reste humain et a une certaine éthique. Pas étonnant, il vient de très bas, continue de veiller sur sa vieille maman et ne parvient pas à conclure avec la femme qu’il aime. Mais c’est temporaire, car Riley en est sûr, « il y a toujours un moyen. »

« Riley tente l’impossible » de Jeff Lindsay, Série Noire, 20 €

dimanche 7 août 2022

BD - Triste vente en ligne


Cela semble si simple et efficace, la vente par correspondance. Un petit clic et le colis arrive chez vous, quelques jours plus tard. Pourtant, derrière ce miracle qui signe l’arrêt de mort de milliers de petits commerces de proximité, se cache aussi une machine à broyer les consciences ouvrières.


Lénaïc Vilain, auteur de BD qui paie de sa personne, est devenu un expert de la mise en situation. Pas toujours voulue. Pour simplement payer son loyer, il doit accepter tous les emplois proposés par Pôle emploi. Même ceux qui l’obligent à aller travailler pour le géant de la vente en ligne. Dans cet album de 128 pages, il raconte son parcours dans ce labyrinthe qu’est un entrepôt où sont mis en boîte les achats de ces millions de Français. Le royaume de l’attitude cool, mais qui oblige les employés à faire des tâches répétitives sans fin. Et les managers ressemblent plus à des gardes-chiourmes qu’à de gentils organisateurs.

Tous les nouveaux (des dizaines chaque semaine) sont en CDD. Seuls les meilleurs seront conservés, avec un CDI à la clé. Les meilleurs ou les plus compatibles avec l’esprit aliénant du géant de la vente en ligne ? La BD de Lénaïc Vilain est un véritable brûlot.

« Dans la boîte », Delcourt, 14,95 €


samedi 6 août 2022

Jeunesse - Poney à la plage


En cette première semaine d’août, si vous êtes en vacances avec des enfants (entre 3 et 6 ans), n’hésitez pas à leur lire la dernière aventure de Palomino, le petit poney imaginé par Michael Escoffier et dont les albums sont illustrés par Matthieu Maudet. Bonnes vacances, Palomino, est parfaitement d’actualité. 


Le jeune poney va donc passer quelques jours au bord de la mer en compagnie de ses parents. Il ne peut malheureusement pas emmener sa meilleure amie, la petite fille Scarlett. En chemin, la voiture fait un drôle de bruit. Cela vient du coffre. Surprise, Scarlett s’est cachée dans la valise de son copain.

Les deux amis pourront donc s’amuser ensemble sur la plage. Mais attention, les dangers sont nombreux. Notamment la marée qui bloque les deux petits sur des rochers. Comment faire pour rejoindre la terre ferme ?

Un album simple et amusant, illustré dans un style très lisible pour permettre aux apprentis lecteurs de bien suivre les péripéties des deux héros.

« Bonnes vacances, Palomino », École des Loisirs, 12,50 €


vendredi 5 août 2022

BD - A-Lan, serviteur et robot


Ils semblent faire une petite fixette sur les robots. Ou, du moins, ils les inspirent. Les Béka, couple de scénaristes composé du Toulousain Bertand Escaich et de la Catalane Caroline Roque, après Cœurs de ferraille, proposent une nouvelle BD ayant un robot pour vedette. A-Lan, dessiné par Thomas Labourot, est au service de Nao et Emoji. Un robot, deux humains et une société futuriste où les intelligences artificielles pourraient dominer le monde, mais ce sont toujours les Humains qui ont le pouvoir.

Nao et Emoji, deux adolescents, ont en commun de ne pas supporter de vivre en société. La première, élevée par une androïde qui se considère comme sa mère, n’a jamais quitté sa maison. Emoji est le premier humain qu’elle rencontre. Un étudiant qui ne supporte pas la foule. Exactement, il perd ses moyens en présence de trois personnes et plus. Dans ce futur où le virtuel est omniprésent, l’intrigue se déroule à deux niveaux. Dans le vrai monde, par robots interposés et dans le métavers où les humains s’écharpent sous forme d’avatars.

De la SF un peu compliquée pour les plus anciens, mais qui passionnera les adolescents.

« A-Lan » (tome 1), Dupuis, 11,90 €


jeudi 4 août 2022

Roman - Panthères rugissantes


Découvertes en mars dernier dans leur première aventure, Amour et vieilles dentelles, les Panthères grises sont déjà de retour pour leur deuxième enquête. Ces Panthères ce sont quatre vieilles dames inventées par Williams Crépin qui se piquent de résoudre des énigmes policières. Attention, si vous êtes amateur des romans de Miss Marple, passez votre chemin, car ces mamies ne sont pas très sortables.

Alice est en pleine dépression. Un chagrin d’amour. Pourtant cette veuve active n’a pas tendance à se laisser aller. Mais cette déconvenue semble être celle de trop. Alors ses copines décident de mettre un peu de paillettes dans sa vie. Pour son anniversaire, elles débarquent dans le petit pavillon de banlieue avec un strip-teaseur. Grosse fiesta à laquelle se joint Chloé, la nouvelle voisine d’Alice.

Une très jeune femme, qui semble battue par son compagnon. Une affaire pour les Panthères ? Pour la police aussi car le couple est soupçonné de préparer un braquage. Voilà comment deux flics vont s’installer chez Alice pour surveiller les suspects tout en supportant les blagues et récriminations des vieilles harpies. On rit beaucoup aux outrances de ces mémés sans gêne.

« Flics au pair » de Williams Crépin, Albin Michel, 15,90 €

mercredi 3 août 2022

BD - Vacances en rouge avec Métal Hurlant


Si vous n’avez pas envie de vous entasser avec les milliers de touristes qui s’agglutinent sur les plages de la région pour ce début août tant redoutée par les agoraphobes. Si même la présence de quelques vaches ou brebis dans les estives des montagnes désertes vous perturbent il ne vous reste plus qu’une solution : partir en vacances sur Mars. Compliqué si l’on n’a pas la fortune d’Elon Musk. Mais pour moins de 20 euros, vous pouvez découvrir les charmes cachés de la planète rouge en vous plongeant dans les 290 pages du numéro 3 de la nouvelle formule de Métal Hurlant.


Que des histoires originales pour cette livraison, avec pour thème, donc, Mars et ses attraits touristiques. Coordonné par Jerry Frissen, le contenu de la revue offre quelques belles surprises comme le retour à la BD de Marc Caro, la découverte de deux signatures féminines talentueuses (Virginie Augustin et Aimée de Jongh).

Seul bémol, c’est beau et intelligent mais manque d’audace et d’originalité, la marque de fabrique du Métal première génération. Exceptée la fresque de Jean Dalin intitulée : A la recherche du Mob.

« Métal Hurlant » (numéro 3), 19,95 €