jeudi 11 juillet 2013

BD - Les Dauphins espions de "Mermaid Project" de Léo, Jamar et Simon


Léo
, l'inventeur des Mondes d'Aldebaran, a plusieurs cordes à son arc. Son imagination sans limite multiplie les projets. Incapable de tout dessiner, il délègue à des dessinateurs soigneusement choisis. Fred Simon se charge de « Mermaid Project ». Corine Jamar aide Léo au scénario. Dans un futur proche, l'économie mondiale est tributaire des producteurs de méthane à base d'algues. Algapower, une multinationale, est soupçonnée par l'ONU de pousser ses recherches en génétique vers le règne animal. Romane, jeune policière parisienne, est envoyée à New York pour enquêter sur la mort mystérieuse d'une employée française de la société incriminée. La blonde héroïne sera réquisitionnée par un commando de l'ONU pour espionner dans les entrailles d'Algapower. Pour s'y rendre, un seul chemin : les égouts. Et pour guide, Romane bénéficie de l'aide d'un dauphin très intelligent. Une série plus ambitieuse qu'il n'y paraît. Avec en toile de fond les manipulations génétiques et les risques de dérive de notre société contemporaine.

« Mermaid Project » (tome 2), Dargaud, 13,99 €

mercredi 10 juillet 2013

BD - Tif et Tondu au patrimoine


En 1996, pour la dernière fois, Tif et Tondu animaient les pages de Spirou. Une 45e aventure signée Sikorski et Lapière, les repreneurs de la série popularisée par Will et Tillieux. « Le mystère de la chambre 43 » voit les deux enquêteurs résoudre une histoire d'homicide dans le cadre d'une station de ski. Les dernières pages existantes des aventures de Tif et Tondu sont reprises dans le treizième volume de l'intégrale. Un clap de fin définitif pour une série entrée au patrimoine de la BD franco-belge. 
La tentative de moderniser les deux détectives ne parvient pas à relancer le fond. Car comme l'explique un dossier en préambule, la reprise plus qu'honorable avait encore de beaux tirages. Mais n'était pas suffisante pour assurer un renouvellement d'intérêt pour le fond. La fin d'un modèle économique. Les collectionneurs se rabattent sur cette très belle intégrale, enrichie de nombreux articles et histoires inédites. 
Ce n'est donc pas sans une certaine nostalgie que le chroniqueur BD parle pour une dernière fois de Tif, le chauve et Tondu, le barbu...

« Tif et Tondu, intégrale » (tome 13), Dupuis, 24 €


mardi 9 juillet 2013

Thriller - Un tueur venu du passé dans "Les Lumineuses" de Lauren Beukes

Un tueur en série trouve le moyen infaillible de ne pas se faire prendre. Il tue dans le futur. Thriller fantastique sombre signé Lauren Beukes.

Au début des années 30, aux USA en pleine récession, il est difficile de survivre. Harper Curtis, vagabond bagarreur, a d'autres soucis en plus que de trouver sa pitance quotidienne. Poursuivi par des dizaines d'hommes en furie, lesquels ont bien décidé de l'éliminer. Un coup de couteau de trop... Acculé, il découvre une maison à l'aspect abandonné. La porte est fermée à clé, mais justement il en a une dans la poche. Volée à sa dernière victime. Il tente le tout pour le tout. Miracle, la maison s'ouvre. Harper Curtis a trouvé un refuge. Il ne le quittera plus. Thriller résolument fantastique de Lauren Beukes, écrivain originaire d'Afrique du Sud, elle s'est déjà fait remarquer avec « Zoo City », prix Arthur C. Clarke en 2011. Là elle change de registre, signant un roman noir brillant et sombre. Elle prend le pari de présenter dès les premières pages le tueur de l'histoire, ce Harper, pervers, illuminé, violent. Des chapitres courts avec à chaque fois un personnage principal. Seconde à entrer en scène, Kirby, une jeune fille qui a eu le malheur de croiser le chemin de Harper. Kirby survit. Après quatre ans de convalescence, elle retourne à l'air libre. Avec une obsession : retrouver son assassin. Car Kirby se considère comme morte...

Maison maléfique
Etudiante en journalisme, elle profite d'un stage au quotidien de Chicago pour remonter la trace de Harper. Une trace visible au fil des décennies. Harper a déjà tué. Dans les années 30, en 50 aussi. Puis régulièrement jusqu'en 1993, l'époque actuelle. Problème, loin d'être un vieillard, c'est un homme dans la quarantaine qui a poignardé l'étudiante mais il boite et marche à l'aide d'une béquille.
Le lecteur comprend vite l'avantage de Harper. En pénétrant dans la maison, il a littéralement été possédé par elle. Sur les murs des chambres, il a vu des portraits de femmes. Ils brillaient dans l'obscurité. Et Harper a compris sa mission : tuer ces femmes et ramener un objet familier à la maison. Pour les atteindre, il lui suffit de penser à elles et quand il sort de la maison, il est à la bonne année. Généralement il effectue un premier contact, quand elles sont enfant. Comme pour hanter leurs cauchemars. Puis y retourne dix ans plus tard et sort son couteau. Ensuite il réintègre à la maison, revient en 1931 et ne craint rien...

Eventrée
En 1989, il rencontre une seconde fois Kirby. Dans les bois. Elle promène son chien. Il la frappe avec sa béquille et l'entreprend à sa façon. « Il relève son tee-shirt et promène une main sur son ventre, la palpant avec des gestes brutaux, semant des ecchymoses sur la peau blanche. Soudain, il plante la lame du couteau dans la paroi abdominale, la fait pivoter d'une torsion du poignet et pratique une entaille au tracé irrégulier, correspondant à la trajectoire de sa main. Elle se cabre violemment, pousse un hurlement. » L'écriture de Lauren Beukes est crue, comme Harper mais aussi Kirby. La jeune fille, taciturne et quasiment asociale, n'a plus qu'une obsession : retrouver Harper.
Elle recevra l'aide de Dan, ancien journaliste fait-diversier, reconverti dans le sport pour cause de dégoût. Le couple n'est pas sans rappeler le duo de Millénium.
Un thriller à la construction différente des classiques du genre, très prenant dès que l'on passe l'obstacle des sauts dans le temps, déroutants durant les premières pages.
 
« Les lumineuses » de Lauren Beukes, Presses de la Cité, 22€

lundi 8 juillet 2013

BD - Vaisseau vivant


Après l'adaptation de « L'assassin royal », les éditions Soleil s'attaquent à un autre gros morceau de la Fantasy made in Robin Hobb : « Les aventuriers de la mer ». Alwett se charge de l'adaptation et Dimat des dessins. A Terrilville, les familles marchandes, après des décennies de prospérité, perdent de l'argent. Pourtant elles ont toujours la meilleure flotte au monde composée de Vivenefs, des bateaux vivants. La proue, en bois sorcier, est vivante et le navire est quasi autonome. Mais la magie ne marche pas toujours. Vivacia est endormie. Elle ne se réveillera qu'à la mort de son propriétaire, le marchand Vestrit, et se mettra au service de son descendant. Une osmose entre Vivenef et humain qui fait tout le sel de cette histoire. Promise à la fougueuse Althéa, Vivacia est finalement léguée à sa sœur, la palote Keffria, mariée au machiavélique Kyle. Le vaisseau vivant va-t-il accepter cette trahison ? Althéa peut-elle se résigner ? La suite est déjà très attendue.

« Les aventuriers de la mer » (tome 1), Soleil, 13,95 €

samedi 6 juillet 2013

BD - M'sieur Maurice et Bazile, deux auteurs inspirés

Quand la jeune génération rend hommage aux grands anciens, cela donne cet album, entre biographie romancée, relecture des classiques et road movie sur les départementales et nationales françaises. Bruno Bazile, comme beaucoup, est fan de Gil Jourdan. Et de son auteur, Maurice Tillieux, touche à tout génial de la BD franco-belge. Bazile va imaginer comment Tillieux s'est servi de son quotidien pour imaginer et dessiner des albums d'anthologie comme « Popaïne et vieux tableaux » ou « La voiture immergée ». Une ambiance étrange ressort de ces histoires courtes. Tillieux semble être souvent à court d'idée. Plus que la page planche, c'est le vide sidéral. Mais il ne s'en inquiète jamais. Son bagout et son incroyable optimisme le sortent toujours d'affaire. Il sait se « vendre » et quand est véritablement acculé n'hésite pas à reprendre les vieux scénarios de Marc Jaguar... Tillieux aimait les voitures. Les dessiner. Les conduire. La Dauphine ouvre l'album. Une R8 de location le referme. La voiture dans laquelle il se tuera, sur une de ces petites routes où il a toujours trouvé ses idées.

« M'sieur Maurice et la Dauphine jaune », Glénat, 13,90 €

vendredi 5 juillet 2013

BD - Meurtres et glamour à Hollywood dans "Miss Octobre" de Desberg et Queireix


Stephen Desberg
, scénariste prolifique (IRS, Scorpion, Empire USA), est né à Bruxelles, mais d'un père américain. Pas étonnant donc si une majorité de ses créations se déroulent outre-Atlantique. « Miss Octobre » est un polar ayant pour cadre la Californie du début des années 60. Un tueur en série s'inspire de la revue Playboy. Chaque mois, il assassine une jeune femme et réalise des photos d'elle, dénudée... et morte. Sur cette intrigue se greffent trois personnages : Viktor, sourde et voleuse, Clegg, flic à l'ancienne, chargé de l'enquête sur le tueur, Ariel, jeune policier ambitieux, sur la piste de Viktor. Le tout est dessiné par Queireix au dessin réaliste, classique, efficace et précis. Le second tome confirme le premier opus. On en sait un peu plus sur la mystérieuse Viktor, Clegg se révèle finalement plein de failles et Ariel définitivement trop arriviste. Le tueur, de son côté, poursuit son chemin sanglant. Mais sa dernière victime est jetée aux ordures : pas assez belle pour être élue playmate du mois...
« Miss Octobre » (tome 2), Le Lombard, 12 €

jeudi 4 juillet 2013

Thriller - Justice et vengeance dans "Le sourire des pendus" de Jérôme Camut et Nathalie Hug

« W3 », la nouvelle série de Jérôme Camut et Nathalie Hug plonge les lecteur dans un monde perverti. Mais les criminels sont toujours punis. Un jour...

L'été, à l'approche des grandes vacances, on se demande souvent quel livre va nous accompagner durant ces journées chaudes et lascives. Une histoire prenante si possible. Et copieuse, pour qu'elle dure. « Le sourire des pendus » de Jérôme Camut et Nathalie Hug semble un bon choix. Il savent raconter des histoires, leurs précédentes créations le prouvent. Avec plus de 750 pages, on est persuadé que cela va nous occuper un bon mois. Si la première affirmation est correcte, la seconde se révèle rapidement fausse. Les personnages et l'intrigue sont tellement addictifs que le pavé est avalé en quelques jours. Chaque chapitre est tellement captivant qu'on n'a qu'une seule envie : lire la suite. C'est le thriller français de l'année.
La mise en bouche de ce roman est percutante. En juillet 2002, des hommes cagoulés pénètrent dans une riche demeure. Ils tuent la femme et enlèvent les enfants avant de se charger du propriétaire des lieux, un célèbre avocat, Eric Moreau. Le tueur s'appelle Ilya Kalinine. « D'un coup sec il éventra l'avocat puis l'expédia par-dessus le garde-fou. Le corps rebondit contre la façade avant de se balancer lentement, juste devant les fenêtres de l'étage inférieur. Les viscères libérés s'échappaient de la plaie béante. » Dix ans plus tard, Lara Mendès, jeune journaliste à la télévision, cherche par tous les moyens a découvrir le fin mot de ce meurtre sauvage.

Enlevée en enfermée
Petite provinciale, ambitieuse et déterminée, Lara va se jeter dans la gueule du loup. Elle pose trop de questions et est elle aussi enlevée. Elle passe plus de la moitié du livre enfermée, seule, dans un bunker. A Paris, son producteur, Arnault de Battz, s'inquiète. De même que Valentin Mendès, le jeune frère de Lara. Alors que Lara se débat dans les ténèbres, affamée, devenant presque folle en imaginant sa lente mort, oubliée de tous, Valentin et Arnault forment un étrange attelage. Le premier, la cinquantaine bien entretenue est le prototype de l'homosexuel parisien adepte de tous les plaisirs. Raffiné, riche et généreux, il se prend d'amitié pour le jeune Valentin, rugbyman pas dégrossi, naïf mais prêt à tout pour retrouver sa sœur. Ils vont refaire une partie de l'enquête de Lara et démontrer qu'elle a été enlevée alors que son fiancé du moment, Bruno Dessay, célèbre journaliste d'investigation, croit plutôt à une fugue, une mise au vert volontaire.
Pour donner encore plus de force à ce roman déjà prenant, Jérôme Camut et Nathalie Hug lancent une enquête parallèle. Elle n'a rien à voir avec la première. Du moins dans les 300 premières pages. Sookie Castel est gendarme en Bretagne. D'origine Haïtienne, cette jolie « black » se désespère des enquêtes de routine. Par hasard, en ramenant un chien perdu à ses propriétaires, elle tombe sur une scène de crime qui pourrait booster sa carrière. « Trois pendus faisaient face à l'entrée, chacun une chaise renversée à ses pieds. Leurs visages noirâtres étaient gonflés, des vers s'accumulaient dans leurs bouche et leurs yeux, et un nuage de mouches bourdonnait tout autour. » Sookie déchante vite. On lui retire l'affaire. Mais elle s'incruste et se lance sur la piste des tueurs. Car elle ne croit pas à la thèse officielle du suicide en famille.
Parfaitement découpé, ce roman, déjà sombre dans ses premières pages, devient de plus en plus noir. Les auteurs, en observateurs attentifs des dérives de notre société, mettent en lumière les agissements de véritables monstres. « Partout, le destin d'innocents est broyé sans pitié. » est-il expliqué. W3 sera là pour leur donner la parole. Rendre justice. Et les venger.
 

« Le sourire des pendus » de Jérôme Camut et Nathalie Hug, éditions Télémaque, 21 euros

mercredi 3 juillet 2013

BD - Janolle raconte la révolte du peuple esclave


Fini la science-fiction, cap sur l'héroic-fantasy pour Alain Janolle. Le dessinateur de HOPE ou de Babel se lance également dans le grand bain du scénario. Il assure seul l'écriture des deux premiers tomes de ce « Trois peuples » spectaculaire et classique. Dans ce monde imaginaire, les humains partagent le pays avec les Lémurs et les Reptiles. Les seconds sont de redoutables combattants, sanguinaires, prêts à tout pour conquérir de nouvelles terres. Les premiers sont des êtres calmes et sensibles, ils vivent dans les arbres. Des proies toutes trouvées pour les Humains toujours à la recherche d'esclaves.
 Alain Janolle raconte comment les Lémurs vont reconquérir leur liberté, osant jouer leur carte personnelle alors que la guerre entre Humains et Reptiles fait rage. Avec un dessin simplifié pais tout aussi expressif et puissant, Alain Janolle plonge le lecteur dans un monde imaginaire qui semble n'être que le début d'une immense saga.

« Trois peuples » (tomes 1 et 2), Glénat, 13,90 € chaque volume


mardi 2 juillet 2013

BD - Les bêtes sanguinaires de Dufaux et Tillier


Béatrice Tillier
devrait faire de la peinture. Dessinatrice de BD semble un cadre un peu trop restreint pour son immense talent. Assurant également la couleur du troisième tome de sa série « Le bois des vierges », elle offre un objet graphique d'exception. Il ne faut cependant pas oublier l'histoire. 
Ecrite par Jean Dufaux, elle permet à la dessinatrice de mélanger humains et bêtes. Aube, la belle et romantique Aube, mariée de force à un loup, a tué son mari la nuit de noces. Depuis, elle est en fuite et la guerre fait rage entre humains et bêtes à poils. Réfugiée dans le magique Bois des Vierges, elle y sème encore la désolation quand son amant, mi homme mi loup, y met le feu. 
Ce dernier chapitre intitulé « Epousailles » est aussi la rédemption de la jeune femme. Elle va permettre à son amant de choisir entre l'homme et la bête et un mariage va installer durablement la paix dans ce monde féerique. Une réussite absolue à montrer dans toutes les écoles de dessin.

« Le bois des vierges » (tome3), Delcourt, 14,30 €

lundi 1 juillet 2013

BD - Pacco est resté un papa gamin

Maé est souvent en retard à l'école. Maé, 7 ans, est surtout en retard à l'école quand c'est la semaine de son père. Pacco, papa divorcé et gamin, poursuit ses confidences sous forme de BD douce amère. Comment ne pas tout passer à une fillette espiègle et surtout assez intelligente pour comprendre que une semaine sur deux, c'est fête ? C'est le dilemme de ce grand adolescent, père par hasard. Geek, surfeur, fêtard, amoureux : l'auteur tente de se montrer sous tous ses angles. 
Il y parvient notamment quand il fait intervenir sa copine du moment, la fameuse Margaux, elle aussi auteur de BD. C'est là que la lecture croisée des deux bouquins devient passionnante. Pacco raconte sa vie avec Margaux Motin et Maé dans « Une semaine sur deux ». 
Margaux Motin donne son point de vue dans « La tectonique des plaques » (Delcourt). Le même trait précis et classe, le regard décalé, les scènes comiques parfois outrancières... Tout trentenaire se reconnaitra dans ces histoires d'amour. Et puis malgré l'humour omniprésent, Pacco parvient à injecter une bonne dose de sentiment. Malgré toutes ses bêtises, il l'aime sa petite Maé. Et rien que pour ce message le livre vaut d'être lu.

« Une semaine sur deux », Fluide Glacial, 14 €