lundi 25 mars 2013

Billet - Super sponsor

Envahissante la publicité. Notamment sur internet où il devient impossible de voir une vidéo sans subir un spot. Si les marques ne ratent aucune occasion de s'incruster sur les écrans, le pire est encore à venir selon un artiste italien. Roberto Vergati Santos a diffusé sur internet un diaporama dans lequel il imagine des super héros sponsorisés comme de vulgaires sportifs. Si Batman reste classe avec la virgule de Nike, Wolverine fait un peu plouc avec le logo d'Adidas sur le torse. Iron Man a l'air idiot  avec le M de MacDo tatoué sur son armure. Quant à Superman, son justaucorps griffé Giorgio Armani casse le mythe. Ce n'est que pure spéculation, mais ne doutons pas que quelques publicitaires vont tenter de récupérer l'idée. 
Pour une fois, la France devrait montrer l'exemple. Nous aussi avons quelques héros ou personnalités au fort potentiel. Reste à y associer le bon produit. Avec Astérix, le Viagra® s'impose tant la petite pilule bleue s'apparente à une potion magique pour certains messieurs vieillissants. Depardieu c'est la vodka. Le vin aussi. Et tout alcool dépassant les 10°... Navarro pourrait décrocher le jackpot en signant pour les couches Confiance. Mais il devra batailler avec Derrick... Quant à Véronique Genest alias Julie Lescault, elle a une nouvelle fois tout compris avant tout le monde. Cela fait des années que son image est associée à une marque de jambon. Les fabricants de quiche parviendront-ils à se relever de cette erreur stratégique ?

Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce lundi en dernière page de l'Indépendant.  

BD - Les cases déstructurées de Fred et Marc-Antoine Mathieu

La bande dessinée souffre d'une image trop formatée. Cases, planches, pagination : longtemps les auteurs devaient se fondre dans un moule, brider leur créativité pour des raisons pratiques, matérielles. Mais certains ont littéralement explosé ces contraintes, dynamitant un principe de narration trop linéaire. Fred, au milieu des années 60, a été un pionnier avec Philémon. Marc-Antoine Mathieu un digne héritier en lançant Julius Corentin Acquefacques dans le monde des rêves.

« Le train où vont les choses »
est le 16e et dernier tome des pérégrinations de Philémon dans le monde des îles-lettres de l'Océan Atlantique. Débuté à la fin des années 80, cette histoire de Lokoapattes embourbées par manque d'imagination était un peu symbolique de l'état d'esprit du créateur. 20 pages et puis plus rien... Des idées noires, un manque d'envie. Fred a changé d'univers pour mieux se retrouver. Mais il avait quand même le désir de boucler la boucle. C'est chose faite, au minimum. Un épilogue sous forme de bande de Moëbius puisqu'on retrouve en scène finale les premières pages du premier album. Un monde meurt, un univers magique se referme. Mais il sera toujours là, grâce aux albums, pour ouvrir celui des générations futures.


« Le décalage »,
6e titre des aventures (même si c'est un bien grand mot) de Julius Corentin Acquefacques, débute... à la page 7. La couverture est en fin de volume et les personnages, pour accélérer leur errance dans le grand rien, ont même arraché des pages au cœur du récit. Julius, en ratant le début de l'aventure, se retrouve dans le rôle du témoin impuissant. Un album de Marc-Antoine Mathieu c'est avant tout des trouvailles techniques. Scénographe réputé, il n'a pas son pareil pour jouer avec les codes de la narration. Un peu comme Fred, mais à la puissance 1000. Fred que l'on retrouve d'ailleurs dans les remerciements, placés au cœur de la BD, décalage oblige.

« Le train où vont les choses », Fred, Dargaud, 13,99 euros
« Le décalage », Marc-Antoine Mathieu, Delcourt, 14,30 euros

dimanche 24 mars 2013

Billet - Twitter a 7 ans, l'âge de réseau


« Twitter fête ses 7 ans... l'âge de réseau. » cette jolie formule est de Diane Saint-Réquier, Mme @lactualaloupe, une « veilleuse » parmi les plus rapides et originales du micro réseau social. Imaginé en 2000, Twitter n'a démarré que le 21 mars 2006 après des années passées dans les cartons de son concepteur Jack Dorsey. Un paradoxe quand on sait que la force de ce concept tient dans sa rapidité. Dans le cas de Twitter, son expansion est directement liée à l'avènement des smartphones. Et la limite de 140 signes n'est pas une invention théorique mais la norme déjà imposée aux SMS. Twitter, à la base, n'est que la simple possibilité de faire un envoi massif (et gratuit) d'un SMS à tous ses contacts. Twitter est l'accélérateur de croissance de l'internet mobile. Facebook tente de se raccrocher aux branches, mais aura toujours un wagon de retard. 
Aujourd'hui, Twitter compte 500 millions d'utilisateurs enregistrés dans le monde. Un quart est véritablement actif. Mais le succès de ce réseau social est flagrant dès qu'il est question d'actualité. Formidable agence de presse planétaire, son instantanéité est redoutablement efficace. Seul bémol, il reste à trouver un pare-feu contre les dérives. Une liberté totale autorise tous les excès, notamment en matière de racisme. Espérons que la plainte au pénal de l'Union des étudiants juifs de France contre l'entreprise américaine fasse un peu bouger les lignes. Même si réclamer 38,5 millions d'euros semble un peu excessif. 

Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue jeudi en dernière page de l'Indépendant

BD - La vie après les barreaux dans "Au vent mauvais" de Rascal et Murat

Sept ans derrière les barreaux. Sept ans de foutus. Abel Mérian a rongé son frein. Condamné pour un hold-up, il a trouvé la patience dans la certitude de retrouver son magot à sa sortie. Sept ans à oublier en se payant une nouvelle vie, ailleurs.
Rascal, le scénariste, est avant tout un romancier. Thierry Murat a adapté ce texte, avec un dessin minimaliste. Grandes cases, couleurs délavées, longs textes narratifs : la forme est plus proche d'un album de Loustal que d'une BD classique. Le lecteur lui est rapidement emporté par ce road movie défaitiste. Rien ne se passe comme prévu et Abel devra trouver une autre chimère pour continuer à croire à cette foutue vie. La déception finale n'en sera que plus douloureuse.
« Au vent mauvais », Futuropolis, 18 €

samedi 23 mars 2013

Billet - Caramba ! Carambar arrête les blagues !


Caramba !  Carambar n'aura jamais plus le même goût. La recette ne change pas mais le fabricant a décidé de
supprimer les blagues à l'intérieur du papier d'emballage. Parler d'une « blague Carambar » est pourtant passé dans le langage populaire pour décrire une mauvaise plaisanterie. Exemple : « Quelle est la blague à deux balles ? Pan Pan ! » Les galéjades seront remplacées par des jeux « ludo-éducatifs », bonjour la prise de tête ! Sur le site internet de la friandise sucrée, un compte à rebours s'égraine inexorablement. Il prendra fin lundi.
Sur Twitter, les réactions des internautes se révèlent très partagées. Un gros contingent affiche sa nostalgie, « l'humour de notre enfance disparaît ». D'autres en profitent pour se moquer de certains comiques : « Les dégâts collatéraux de l'affaire Carambar. Le prochain spectacle de l'humoriste Arthur est annulé » twitte Didier Porte, toujours aussi vachard avec son « collègue ». 
Cette décision marketing possède au moins le mérite de remettre le produit à la pointe de l'actualité. Les nostalgiques ne représentent certainement pas les consommateurs d'aujourd'hui. Les enfants ont beaucoup changé. Si les blagues disparaissent, c'est non seulement parce qu'elles ne font plus rire, mais qu'en plus elles paraissent complètement ringardes à une clientèle incapable de comprendre le second degré.
Enfin, les indécrottables grands enfants pourront se rattraper avec les décalcomanies de Malabar. Même si aujourd'hui on dit « tatoo »...
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce samedi en dernière page de l'Indépendant.

BD - Nomade en approche

Retour aux sources pour
Jean-David Morvan. Le scénariste de Sillage avait fait le pari, à ses débuts, de lancer une série inspirée du rythme des mangas. Nomad, feuilleton de science-fiction, était dessiné par Buchet et Savoia qui eux aussi ont fait une belle carrière par la suite. Avec cette fois Carette au dessin, Morvan relance son héros sur les routes de ce futur technologique et totalitaire.
Retiré dans le désert du Sahel avec sa femme et son enfant, Nomad voulait oublier les péripéties liées à son pouvoir de contrôler les technologies. Mais sa famille est enlevée par un commando nord coréen. Il va devoir rejoindre l'Asie pour les libérer. Première difficulté, quitter cette Afrique violente et repliée sur elle-même.
Un premier épisode sans temps mort, avec en guest-star une dizaine de planches signées Savoia, toujours impliqué dans le projet.
« Nomad 2.0 » (tome 1), Glénat, 13,50 €

vendredi 22 mars 2013

Billet - Les corrections à la chaîne de Petit Prof

Si l'enseignement de l'écriture cursive va se raréfier (voir précédemment), il reste encore du travail côté grammaire et orthographe. Pour s'en persuader il suffit de faire un tour sur le compte Twitter de
@Petit_Prof. Sobrement présenté par le laconique « Un prof, des élèves. No routine », on y trouve des perles de collégiens à mourir de rire. Et surtout récentes, quasiment d'actualité. Du genre, quand le prof demande de raconter la journée d'un chevalier, à la pause déjeuner, il « mange des kebbabs »... Autre devoir, sur l'analyse d'un roman de Jean Giono cette fois. Un cancre, plus intéressé par le cinéma américain que par la littérature française, considère que « l'auteur puise son imagination dans l'univers de Pirates des Caraïbes. » 
Petit Prof assure que tout est vrai. Souvent elle photographie des portions de copie. C'est tout bonnement hallucinant. Feuilles raturées, mots inventés, dessins dans les marges... les ados d'aujourd'hui ne manquent pas d'imagination. Certains ont même un réel avenir dans l'humour. « Avec le verbe "onduler", on voit que l'eau devient molle » explique cet observateur. Pour un poète, tendance slam religieux, « Une strophe de trois vers s'appelle une diocèse ». Ce dernier qui ne se foule vraiment pas : « Copier-coller tout un article Wikipédia dans un devoir en laissant les liens hypertexte. ».
Et pourtant Petit Prof aime son métier. Pourquoi , Réponse dans ce tweet : « Vu ancien élève. À l'époque, renfermé et transparent. Maintenant, épanoui. "Vous m'avez fait aimer les livres." »

Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce mercredi en dernière page de l'Indépendant. 

Roman - Règlements de contes dans "La petite fêlée aux allumettes" de Nadine Monfils

Tous plus dingues les uns que les autres, les personnages du roman de Nadine Monfils séduisent malgré leur monstruosité.
  
Entre polar, thriller sanglant et délire surréaliste, ce nouveau roman de Nadine Monfils confirme l'incroyable talent de cet auteur belge vivant à Montmartre. La littérature francophone privilégie en général les gens « normaux » aux cas sociaux. Chez elle, on retrouve dans ses personnages une outrance rare. Son style a des airs de San-Antonio ou des dialogues d'Audiard. Mais c'est avant tout du Nadine Monfils, totalement barré, un peu poétique et franchement abracadabrantesque.
Les premières pages du roman, d'une façon tout à fait classique, nous permet de faire connaissance avec les différents protagonistes. Nake en premier lieu. Une jeune femme, droguée, capable de se prostituer pour se payer ses doses. Justement elle est en pleine transaction avec un client. Louche le client. Nake lui plante un couteau dans le ventre et déguerpit. Place ensuite à Mémé Cornemuse. Elle décroche haut la main le pompon dans la catégorie iconoclaste. Cette presque centenaire, « espèce de vieille guenon à casquette armée d'un flingue », surprend un couple en pleins ébats dans les dunes. Elle veut participer. Refus de la dame. Pan ! Une balle dans la tête pour la mégère pas partageuse. Mémé Cornemuse revient régulièrement dans le récit, toujours avec des réactions extrêmes et des attitudes libidineuses.

Michou ou Betty ?
Le côté policier du récit est fourni par l'inspecteur Cooper et son coéquipier Jean-Michel. Un vieux flic bourru et un jeune diplômé. Le premier est de la vieille école, le second plus en adéquation avec l'univers de Nadine Monfils. Jean-Michel préfère qu'on l'appelle Michou, a les airs efféminés de l'homosexuel qui s'assume et devient carrément Betty en dehors de ses heures de service. Betty, danseuse dans une boîte de strip tease, qui elle aussi vend son corps pour arrondir les fins de mois. Elle joue aussi à dealer un peu. Notamment à Nake. La boucle est bouclée, les nez bien remplis.
Tous ces fous en liberté évoluent dans la ville imaginaire de Pandore, cité inspirée d'un tableau de Magritte. Pandore a peur. Un tueur en série sévit depuis quelques jours. Il assassine des fillettes ou des jeunes femmes, transforme les scènes de meurtres en reconstitution de contes de Perrault. Après le petit chaperon rouge les fesses à l'air et une patte de chat dans la bouche, c'est le Petit Poucet qui est retrouvé égorgé puis Blanche Neige pas en meilleur état...
Ces crimes mystérieux donnent du fil à retordre à Cooper. Heureusement il reçoit l'aide de Mémé Cornemuse venue renforcer son équipe. Car cette fan d'Annie Cordy – son truc c'est de tchatcher avec un Jean-Claude Van Damme imaginaire - s'impose de force au commissariat et se fait plein d'amis dans la fonction publique en échange de quelques gâteries savamment distillées...
Alors qui est le tueur ? Pourquoi Perrault ? Quel rapport avec Nake qui n'a jamais connu son père ? Mémé Cornemuse parviendra-t-elle à faire changer les orientations sexuelles de Jean-Michel ? Cooper peut-il tomber dans les bras de Betty ? Et qui sont ces hommes à chapeau melon ne sortant que la nuit ? Ce n'est qu'un petit échantillon des nombreuses questions rythmant ce roman gigogne, sans morale mais bardé d'humour. Ubuesque. 
"La petite fêlée aux allumettes", Pocket, 6,10 euros (vient de paraître chez Belfond la suite des aventures de Mémé Cornemuse "La vieille qui voulait tuer le bon dieu")

jeudi 21 mars 2013

BD - Oreilles pointues chez les Elfes de Soleil


Popularisées par Glénat et Delcourt, c'est au tour de Soleil de se lancer dans la série-concept. Logiquement c'est dans l'héroïc fantasy que l'éditeur toulonnais puise son inspiration. « Elfes » sera composé de cinq titres publiés sur une année. Chaque titre sera l'œuvre d'un duo différent. En commun, le monde des Elfes et leurs différentes races. Les Elfes bleus, écrit par
Istin (coordinateur de la série) et dessiné par Duarte, se penche sur ces créatures, mal vues des humains, mais souvent sollicitées par les humains car excellents guerriers-mercenaires. Il y est raconté comment la conquête du Crystal permet aux elfes bleus de commander à la mer.
Le titre suivant, en mai, se penche sur la vie des elfes sylvains, réfugiés dans les forêts de ce monde imaginaire. En août, ce sont les elfes blancs, les plus puissants de l'espèce qui seront dans les bacs des libraires. Attention, vous risquez vite de devenir accros...
« Elfes » (tome 1), Soleil, 14,30 €

mercredi 20 mars 2013

Billet - L'écriture en option

Plusieurs états américains viennent de décider que l'enseignement de l'écriture cursive deviendra une option dans les prochaines années. Oui vous avez bien lu (vous savez, la lecture, ce truc ringard appris dans votre enfance), l'apprentissage de l'écriture  ne sera plus obligatoire partout aux USA dès la rentrée 2014 ! A la place, les élèves bénéficient de cours sur des logiciels de traitement de texte. Le clavier va définitivement enterrer le porte-plume.
Je ne vous ferai pas l'affront de jouer le rôle de l'ancien combattant, regretter avec des trémolos dans la voix (ou plutôt des tremblements dans les doigts qui frappent les touches) quelque chose qui a quasiment disparu de mon quotidien. Car je l'avoue, je n'écris presque plus à la main. Excepté pour prendre des notes, mes stylos sèchent désespérément sur mon bureau, abandonnés, délaissés. Toutes ces chroniques sont directement tapées au clavier, archivées sur le disque dur, dématérialisées. Les jeunes d'aujourd'hui ne tiennent plus de journal intime. Tout au plus postent-ils leurs états d'âme sur leur page Facebook. Certaines tablettes proposent l'option écriture. Avec un stylet, vous écrivez, le logiciel tape le texte à votre place. Mais je sens que cet argument ne se montrera pas déterminant. 
Le problème se posera cruellement dans quelques années, quand les décideurs exigeront, en vain, des lettres de motivation manuscrites. Et les graphologues iront tous pointer au chômage... 
 
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue mardi en dernière page de l'Indépendant.