Ils sont tracassés les personnages de ces deux romans. Entre l'éleveur de porc, fétichiste de poupées et le jeune garçon attiré par les vieux messieurs, attendez-vous à d'étranges rencontres
L'amour prend parfois d'étranges chemins de traverses. Dans « La fourmi assassine » de Patrice Pluyette et « Votre serviteur » de Christian Combaz, il frappe dans des lieux inattendus. Et des personnages peu communs.
Legousse, éleveurs de porcs, ne demande pas grand chose à personne. Son plaisir c'est d'acquérir des poupées grandeur nature, aussi vraies que de véritables femmes. Il aime les sortir, leur faire faire du shopping et même aller au bar avec elles. Un véritable harem qui résout bien des problèmes dans la vie triste de cet homme solitaire. Legousse est au centre de l'intrigue d'un roman iconoclaste signé Patrice Pluyette. Sa passion des poupées le rend suspect au yeux de la majorité des gens « bien pensants ». Aussi, quand Odile Chassevent disparaît, il se retrouve logiquement dans la liste des suspects. Mais Odile a sans doute d'autres raisons de s'éclipser de la vie de son mari. Ce dernier le reconnaît, mais un peu tard : « On recrée en totalité le spectre de la femme perdue, la vie autour, elle et nous dans cette vie. Il mesurait son attachement à elle. Il était prêt à tout recommencer pour la faire revenir. Il reconnaissait ses erreurs. Il aurait dû lui parler plus souvent. Lui dire qu'il l'aimait. Se rendre disponible. Il pensait qu'elle ne partirait jamais et qu'il aurait assez de la vie pour s'améliorer. Maintenant c'était trop tard. C'est toujours trop tard pour bien faire dans la vie. » Oui, la vie est d'une grande complication, à tous les niveaux. Patrice Pluyette nous l'explique dans le détail en déroulant les vies de ces héros du quotidien. On se reconnaît (un peu) même si certaines attitudes nous semblent réellement extrêmes.
Mon amour de général
L'amour aussi est omniprésent dans le roman en partie autobiographique de Christian Combaz. « Votre serviteur » retrace la jeunesse d'un petit Français comme les autres. Enfin pas exactement puisque rapidement il se découvre des attirances sexuelles assez éloignées de la moyenne : seuls les vieux messieurs l'émoustillent. Invité chez un ami rencontré à khâgne, le narrateur, Simon, lui révèle « qu'il n'a aucun goût pour les jeunes filles. Puis, répondant à une question qu'on ne lui posait pas davantage, il ajouta que les jeunes hommes le laissaient indifférent aussi (…) Il fallait admettre qu'il était tombé dans une case négligée par les statistiques. Sa particularité ressemblait à ces cultes sectaires qui n'ont qu'un millier d'adeptes. »
Le provincial va s'installer à Paris, découvrir la haute bourgeoisie, devenir l'ami et le confident de quelques hommes influents pour finalement rencontrer l'amour de sa vie, un vieux général de l'armée de l'air. Etonnante histoire que la leur, l'ancien militaire et le petit journaliste, partant en vacances comme oncle et neveu, oubliant toute pudeur une fois à l'abri, dans l'intimité de la chambre.
En plus d'une description détaillée et savante du milieu culturel des années 70, ce récit est avant tout une très belle histoire d'amour, où la différence des âges importe peu, si ce n'est qu'elle implique la disparition du général d'aviation bien avant Simon.
« La fourmi assassine », Patrice Pluyette, Seuil, 15 €
« Votre serviteur », Christian Combaz, Flammarion, 21 €
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