Si vous êtes malade, évitez de tomber entre les mains de Peter Brown, le médecin de ce polar de Josh Bazell. Auparavant, il était tueur à gages...
La mort est souvent omniprésente dans les hôpitaux. Le Manhattan Catholic Hospital, établissement où officie le docteur Peter Brown, héros du roman de Josh Bazell, n'échappe pas à la règle. Et Peter Brown, la mort, il connait bien. Cet interne vit sa deuxième existence officielle. Précédemment, il était tueur à gages pour la mafia. Soigner ou tuer : il n'y a souvent qu'une infime frontière. Il a fait le grand saut. Dans les premières pages de ce polar, on ne connait rien du passé du docteur. On le suit allant au travail. Et déjà on comprend qu'il n'est pas exactement comme les autres praticiens. Plus proche du Dr House que de votre médecin de campagne.
En chemin il corrige un olibrius qui le braque, puis s'envoie en l'air dans l'ascenseur avec une gentille représentante pharmaceutique. Quand vient l'heure de sa tournée, il prend quelques précautions. Comme gober un cachet de Moxfane. « Le Moxfane est un médicament qu'on donne aux pilotes de bombardier qui décollent du Michigan sans escale pour bombarder l'Irak et rentrer au Michigan sans escale. On peut soit l'avaler, soit le mettre dans le moteur en guise de carburant, au choix. »
Le retour de Griffe d'ours
Les dix premières pages donnent le ton du roman qui rapidement ne sera pas que médical. Car Peter raconte, entre ses consultations et quelques opérations, comment il est devenu mafieux. A la base, la mafia ne l'intéressait que pour retrouver deux petits truands qui avaient assassiné ses grands-parents. Pour ce faire il s'est littéralement fait adopter par un avocat véreux. Il est devenu tueur à gages en flinguant les meurtriers de sa famille. Un très bon tueur répondant au pseudo de « Griffe d'ours ».
Mais tout cela c'est du passé. Aujourd'hui Peter est un médecin, pas spécialement honorable, mais qui a tiré un trait sur cette période de sa vie. On apprend même un peu plus loin dans le roman qu'il est sous la protection du Witsec, le programme de protection des personnes qui témoignent contre le crime organisé.
Et Peter, justement, a rudement besoin du Witsec ce matin car un de ses nouveaux patients, un certain LoBrutto en le voyant l'accueille avec effroi : « Oh putain ! Crie-t-il en se recroquevillant comme pour me fuir, mais entravé par ses perfusions et les fils qui le relient aux moniteurs. Griffe d'ours ! Ils t'ont envoyé pour me buter ! ». LoBrutto est en réalité Squillante, un mafieux atteint d'un cancer et qui n'a plus que trois mois à vivre. Mais c'est certainement suffisant pour qu'il prévienne tous ses collègues qui tentent de mettre la main sur Griffe d'ours. Le docteur Brown va devoir agir vite. En quelques secondes il imagine trois façon différentes pour assassiner Squillante : de l'air dans le cathéter (mais il en faudrait trop), un bouchon bloqué dans le larynx, « les bois légers n'apparaissent pas aux rayons-X » ou le shooter au potassium, « son cœur s'arrêtera sans faire de pics sur son électrocardiogramme ». Une urgence l'entraîne à l'autre bout de l'hôpital. Ce n'est que partie remise, mais rapidement les affaires se compliquent pour le docteur Brown.
Ce roman, le premier de Josh Bazell, lui-même médecin, semble tout à fait immoral. Mais on apprend pourquoi le docteur, dont le véritable nom est Pietro Browna, avait tant de haine à une certaine époque de sa vie. Cela ne l'excuse pas, mais on le comprend mieux. Et au fil des pages il s'humanise, quand il devient le chaperon de Skinfilk, son frère d'armes, puis quand vient l'amour et la rencontre de la belle Magdalena, musicienne roumaine. Mais il n'a pas le temps d'être nostalgique. Quatre comprimés de Moxfane et direction le bloc opératoire... Ça tombe bien, c'est Squillante qu'il faut « ouvrir ».
« Docteur à tuer », Josh Bazell, Lattès, 20 €
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