mercredi 26 février 2025

BD – Journaliste infiltré et chocolat

 

Après le concept de reportage dessiné (un reportage sous forme de bande dessinée), place à la BD... sur un reportage. Pour inaugurer la formule, Antoine Dreyfus, journaliste indépendant raconte comment il a tenté d'obtenir une interview de Kim Jong Un, président à vie de la Corée du Nord. Il s'est fait passer pour un industriel désirant investir dans le domaine du chocolat. Un album assez rocambolesque tant ce pays, paradis des paranoïaques, empêche quiconque d'avoir une attitude saine et véridique.

Il est beaucoup question de visa au début du récit dessiné par Fanny Briant. Antoine a raté une interview exclusive car il a oublié de demander ce fameux visa, essentiel quand on a la prétention d'aller dans une dictature (la Syrie en l'occurrence). Pour se rattraper auprès de ses chefs (il travaille à l'époque pour un grand hebdomadaire français), il tente de décrocher une entrevue avec un autre dictateur, Kim Jong Un, président de la très fermée Corée du Nord. Cette fois il demande bien un visa. Immédiatement refusé : pas un seul journaliste occidental ne peut franchir la frontière ! 

Il a alors l'idée de se faire passer pour un investisseur et d'infiltrer un voyage d'affaires. Il devient donc spécialiste de la fabrication du chocolat, expert en tablettes après un stage intensif dans l'entreprise Cémoi. Pour rejoindre PyongYang, il passe par l'intermédiaire du Catalan Alejandro Cao de Benos, seul Européen dans les petits papiers du dictateur.

Avec une collègue qui connaît un peu le pays, Antoine va raconter cette semaine passée dans une ville déserte, à rencontrer des hommes froids et suspicieux, incapables de s'engager, sans croiser la population, surveillés en permanence, avec la crainte perpétuelle de se faire démasquer. Si vous n'avez qu'une notion vague de la paranoïa, lisez cette BD, vous comprendrez mieux. L'expérience ultime étant de se rendre en Corée du Nord. Mais là, c'est à vos risques et périls. Antoine Dreyfus en est le vivant témoignage.

« PyongYang parano », Marabulles, 128 pages, 23,95 €

mardi 25 février 2025

BD - Rodolphe et Griffo revisitent "La main du diable" de Stevenson

Jeune maison d'édition belge, Anspach a désormais suffisamment d'expérience et bonne réputation pour attirer des cadors de la BD. Fin janvier ce sont Rodolphe et Griffo qui ont apporté leurs signatures au catalogue de plus en plus prestigieux de la société. Le premier, scénariste ayant des centaines d'albums et des dizaines de séries à son actif, le second, dans le métier depuis le début des années 70, sait tout dessiner, du comique au réalisme en passant par la SF, le fantastique ou les récits historiques comme cette "Main du diable" se déroulant à la fin du XIXe siècle. 

Partant d'une nouvelle de Stevenson, le duo a transposé ce court récit de damnation éternelle. A bord d'un bateau reliant Hawaii à San Francisco, Robert Louis Stevenson est abordé par un autre passager, Charles Dawson. Ce dernier veut lui conter une histoire, son histoire. Celle d'un homme à qui tout sourit depuis quelques mois. 

Cette chance il la doit à la main du diable, un objet qu'il a acheté à un riche Américain alors que lui-même errait presque sans le sou dans les rues. Depuis, tous ses désirs deviennent réalité. Argent, femmes, maison... sa vie est un rêve. Mais cela a un prix. Il devra revendre (moins cher que ce qu'il l'a acheté) cet objet du diable avant sa mort. Sinon c'est assurément un billet simple pour l'Enfer. 

La malédiction va rapidement provoquer angoisses et insomnies à cet homme qui était persuadé de parfaitement vivre cette "chance" unique. 

Rodolphe adapte avec clarté et fluidité cette descente aux enfers, donnant l'occasion à Griffo de dessiner de très jolies femmes, des décors spectaculaires et un cauchemar mémorable prouvant qu'il est aussi capable de manier un style graphique différent, plus éthéré, moins réel. 

"La main du diable", Anspach, 56 pages, 16 €   

lundi 24 février 2025

BD - Un très vieux cold case pour le Lieutenant Bertillon

Il est de très méchante humeur le lieutenant Bertillon dans les premières pages de sa seconde enquête. Il est vrai que ce flic atypique, peu adepte de l'obéissance aux ordres de la hiérarchie, est allé un peu trop loin la dernière fois. Résultat, il se retrouve muté dans un petit village de pêcheurs au bout du bout de la banquise. Pas content Bertillon car il ne se passe rien, qu'il fait très froid et... qu'il fait très froid. Il passe ses journées, alternativement, sous sa couette ou au comptoir du bar-épicerie, épicentre de la vie locale. 

Son supérieur (ils sont trois en poste...) a pourtant besoin de lui. Une tempête se lève, le blizzard arrive et deux gamins sont introuvables. Bertillon va se perdre au guidon de sa moto-neige, manquer de se faire massacrer par un énorme phoque, échapper aux dents d'un orque, porter secours à un pingouin immédiatement adopté et baptisé Tak et, cerise sur le gâteau, découvrir un bateau de pêche au sommet d'un iceberg. 

C'est la découverte du Sedna, disparu depuis 18 ans, qui va donner du fil à retordre aux enquêteurs. Bertillon, avec son flegme habituel, va remuer le passé, ne faisant pas que des heureux quand il résoud cette cold case. 

Cyrille Pomès, au dessin, a également participé au scénario avec Carine Barth. Un album à l'ambiance unique, où, avec un étonnant rebondissement, le lien avec le premier tome permet de donner cohérence et finalité à cette quête au trésor au pays des glaces éternelles et du pétrole abondant. 

"Une enquête du lieutenant Bertillon - Sedna" (tome 2), Dupuis, 80 pages, 17,50 €

dimanche 23 février 2025

BD - Alphonse, chômeur qui donne de sa personne

Le marché de l'emploi est en pleine révolution. Terminés les métiers pépères que l'on occupait durant toute une vie de labeur. Désormais le CDD prime. Et les métiers changent. Beaucoup n'existaient pas il y a quelques années. D'autres sont peu connus. Une originalité qui a donné l'idée à Philippe Pelaez, scénariste alternant tous les genres, pour dit-il, "ne jamais rester dans sa zone de confort", ces histoires courtes comiques vues depuis quelques mois dans Fluide Glacial. 

Le héros, Alphonse, est le prototype du chômeur longue durée, acceptant tous les emplois, même les plus improbables. Voilà comment il se retrouve, sous les crayons de Pascal Valdés, bombardé "branleur de dindons" dans une ferme typique de la France profonde. Des dindons qui semblent apprécier sa présence. On rit à ces péripéties campagnardes, plus que si vous avez eu la malchance d'occuper le métier saisonnier très redouté dans le sud-ouest de "castreur de maïs". 

Les histoires courtes voient notre pauvre Alphonse devenir prof d'anglais en prison ou renifleur d'aisselles (un métier qui ressemble à s'y méprendre à testeur de médicaments pas encore tout à fait au point...). Le récit le plus bidonnant est peut-être quand il accepte d'être "nettoyeur de scène de crime". Certes il a des notions de "technicien de surface", mais un peu moins de "crime" quand il est associé au sang, tripes et morceaux de cervelle collés au plafond. La liste de ces métiers aussi détestables que comiques semble infinie. Une seconde livraison ne déplairait pas au lecteur en mal "d'umour et bandessinées", slogan toujours d'actualité pour Fluide Glacial qui fête le mois prochain ses 50 ans. 

"Alphonse, la gueule de l'emploi", Fluide Glacial, 56 pages, 13,90 €

Philippe Pelaez et Pascal Valdés seront présents aux prochaines Rencontres autour de la bande dessinée qui se déroulera du jeudi 17 avril au dimanche 20 avril, au Palais des congrès de Gruissan dans l'Aude.

samedi 22 février 2025

Science-fiction - Le long voyage vers Nüying, la planète gelée

Découvrir une autre forme de vie : c'est le but ultime de nombreux scientifiques dans ce lointain futur raconté par Emilie Querbalec. Dans quelques siècles, les explorateurs de l'espace savent tout de notre système solaire (alors qu'actuellement certains tentent vainement de rejoindre Mars...). Quand les grandes oreilles des observatoires enregistrent une sorte de mélopée en provenance d'une planète très éloignée, ils se mettent à espérer que c'est un signe de vie. Ces "chants", très ressemblants à ceux des baleines, viennent de Nüying, planète située à vingt-cinq années-lumière de la Terre. Dès lors, un milliardaire décide d'aller voir sur place. Par tous les moyens.

Cette expédition, la plus formidable jamais tentée par l'Humanité, est au centre du roman. Un vaisseau monde est fabriqué et va tenter de découvrir ce que cachent les chants captés en provenance de cette planète, a priori recouverte de glace excepté au niveau de l'équateur. 

Le voyage sera long. Très long. Les scientifiques seront placés dans un état qui leur permettra de se réveiller une fois en orbite. Cela implique pour eux d'abandonner toute famille sur terre, de survivre à certains. Pour faire fonctionner le vaisseau, des colons-mécaniciens partent en famille. Ce seront aussi les premier habitants de Nüying si elle est vivable. Sinon, ils resteront dans le vaisseau, en orbite. 

Pour raconter cette aventure, la romancière détaille la vie de quelques protagonistes. Brume, spécialiste du langage des dauphins est du voyage. Elle espère plonger dans l'océan de la planète et mélanger sa conscience avec les "chanteurs locaux", comme elle le faisait avec les mammifères marins sur terre. On suit aussi Will, un informaticien chargé de mettre au point une interface pour transférer une conscience d'un corps à un autre. La quasi immortalité. C'est sur ce thème que la réflexion d'Emilie Querbalec est la plus novatrice. Elle imagine les conséquences désastreuses sur un esprit qui passe de corps en corps, incapable de s'acclimater à ce perpétuel changement. 

Ce roman fera rêver tous les passionnés de voyage dans l'espace. Même quand rien ne se déroule comme prévu. Le périple est beaucoup plus mouvementé que prévu et une fois en orbite, la descente vers la terre ferme ("Nüying ferme" exactement), loin d'être parfaite. Les quelques survivants, dont Brume et Will, font ce triste constat : "Aucune balise de détresse, aucun SOS ne pourrait les sauver. La Terre, à vingt-cinq années-lumière de là, ne pouvait rien pour eux. Il leur faudrait apprendre à se débrouiller seuls, sur ce monde inhospitalier où ils n'étaient rien d'autre que des corps étrangers, à peine une écharde plantée dans la couche la plus superficielle de la croûte rocheuse." Bref, ailleurs c'est sans doute très bien, mais ici et maintenant, c'est encore mieux ! 

« Les chants de Nuying », Emilie Querbalec, Le Livre de poche, 544 pages, 9,90 €

vendredi 21 février 2025

BD - Dans les affres du "Magma" de Nicolas Bastide

Entré dans la BD en tant que coloriste, Nicolas Bastide, fort d'une belle expérience dans un collectif d'Angoulême, signe son premier album. Une histoire fantastique inquiétante, terrifiante, inspirante. Une centaine de pages parfaitement composées où les personnages principaux vont faire une expérience unique de découverte d'un monde parallèle. 

Sur une petite île volcanique, sans doute à la fin du XIXe siècle au large de l'Angleterre (rien n'est véritablement expliqué), une fillette joue dans la nature alors que ses parents se prélassent dans l'herbe. Elle disparait brièvement et est retrouvée inconsciente. Elle aurait chuté. Mais son explication est différente. 

Entre les rochers, elle a découvert une ouverture vers le magma des entrailles de l'île. Elle s'est dirigée vers ces paysages rougeoyants puis a fait demi tour. Depuis, elle a des visions qui terrorisent les habitants de l'île. Envoyée en pension dans une institution religieuse, elle va y mourir assez jeune, laissant à ses parents un cahier secret où elle raconte ses péripéties dans le magma. 

Trente années plus tard, une autre femme est découverte évanouie au même endroit. Son mari, un antiquaire, va utiliser le cahier de la première victime pour tenter de réveiller son épouse. Cette quête dans le fantastique permet à l'auteur, Nicolas Bastide, de montrer tout son talent lors de scènes oniriques puissantes. Un album original et personnel, loin de tout cliché ou mode du moment, aux dessins expressifs au service d'une histoire entre cauchemar et découverte de soi.

"Magma" de Nicolas Bastide, Glénat,  104 pages, 22,50 €

jeudi 20 février 2025

BD – Thellus, une planète et deux destins

Simona Mogavino au scénario, Laura Zuccheri et Carlos Gomez au dessin : la découverte du monde de Thellus se poursuit dans les deuxièmes tomes de la vie de Kad Moon et Eva Samas. Vaste projet passionnant,cette série de pure science-fiction permet au lecteur de se téléporter sur la planète de Thellus.

Dans un futur très éloigné, humains et autres entités plus ou moins intelligents cohabitent sur cette boule regorgeant de vie. Pour comprendre ce qui attend la majorité des habitants, on suit le parcours de deux « héros ». Kad Moon et Eva Samas font partie de ces courageux qui tentent de faire bouger les choses et vont façonner l'avenir de la planète. Mais le final, ce sera le cinquième et dernier tome de la saga, quand ils seront réunis.

Pour l'instant, ils œuvrent chacun de leur côté, deux histoires parallèles dessinées par deux auteurs différents. Kad Moon, fils d'un guerrier redouté, est capturé par des rebelles. Il va tenter de sauver des « bicéphales », créatures frustres aux griffes redoutables. Eva Samas, elle, découvre ses origines (métisse d'un conquérant humain et d'une créature mi-humaine mi-serpent). Cela renforce son envie de vengeance.

Les deux histoires sont particulièrement violentes. Que cela soit dans des ruines ou une forêt impénétrable, la mort est toujours en embuscade.

Des récits qui permettent essentiellement de mieux comprendre l'histoire de la conquête de Thellus. Et de prendre conscience aussi de l'incroyable richesse de sa faune. 


C'est sans doute le côté le plus intéressant de la BD : de créatures éthérées dotées d'ailes fines aux gigantesques crocodiles en passant par des sortes de phasmes géants télépathe, la scénariste a lâché la bride de son imagination.

Une belle réussite, avec beaucoup de suspense au final. La conclusion est très attendue.

« Thellus - Le cycle de Kad Moon » (tome 2), Glénat, 56 pages, 14,95 €

« Thellus – Le cycle d'Eva Samas » (tome 2), Glénat, 56 pages, 14,95 €

La chronique des tomes 1  

mercredi 19 février 2025

BD - Les souvenirs oubliés

La mémoire est une des particularités humaines les plus fascinantes. Comment fait-on pour se souvenir de tout ce qui nous arrive ? Ou plus exactement, pourquoi on oublie tant de choses qui nous semblent pourtant si importantes quand elles nous arrivent ? Trou de mémoire. Impossible à combler. Ce questionnement est au centre du roman graphique de Phicil, Les fantômes du Mont-Blanc. Une longue quête dans le passé qui passe par l'intermédiaire d'un bon gros chien. Bernie. De son nom exact : Bernie le bouvier bernois. 

Le gros toutou est heureux avec sa maîtresse, mais elle est mutée en ville. Elle doit donc s'en séparer. Voilà pourquoi en plein hiver, elle le confie à M. Weiss, un vieil horloger à la retraite vivant dans un petit village de montagne dans les Alpes, pas loin du Mont-Blanc. Un choc pour Bernie. 

Mais il n'est pas au bout de ses peines car en chemin, il croise une sorte d'horrible épouvantail. Et la nuit, dans l'atelier silencieux de son nouveau maitre, il se retrouve face à un vilain petit chien et une jolie fille aux cheveux d'un rose éblouissant. 

Elle se nomme Edèle, mais c'est tout ce qu'elle se souvient de son passé. Le trio, accompagné de l'oiseau d'un coucou mécanique, va aller à la recherche de traces du passé d'Edèle dans les divers lieux du village. Rencontres magiques, réminiscences tragiques : Bernie va tout faire pour aider ses nouveaux amis. 

Cette rêverie montagnarde, va devenir plus dramatique au fil des pages. Une belle réflexion sur le sort des réfugiés, des erreurs du passé, de la mort et de la résilience. C'es
t grave mais aussi très plaisant grâce à ce bon gros Bernie, serviable et fidèle. 

"Les fantômes du Mont-Blanc", Delcourt, 176 pages, 22,50 €

mardi 18 février 2025

BD – Survivre face à un chasseur implacable

Tous les amateurs de nature savent que croiser un groupe de chasseurs n'est pas toujours sans risque. D'un côté des hommes et femmes qui se contentent de vivre le moment, de l'admirer pour s'en souvenir, de l'autre d'autres passionnés, mais qui ont une arme entre les mains. Au moindre problème, le rapport de force peut devenir plus que problématique pour les désarmés. 

C'est en gros ce qui se passe dans cet album écrit par Christophe Bec et dessiné par Valerio Giangiordano. Dans un parc naturel d'Oregon, un groupe de jeunes alpinistes va se mesurer à une montagne mythique, le Mont Jefferson. Mais avant d'atteindre les pentes abruptes, ils doivent traverser une réserve indienne et une zone boisée qui est le terrain de jeu des chasseurs locaux. Un malheureux accident et tout dégénère. La nature sauvage le devient encore plus quand un père se lance dans une terrible vendetta. 

Sans éviter l'écueil du manichéisme, cet album est brut de décoffrage. Un gibier, des prédateurs, des conditions météo extrêmes : le décor et le générique de cette BD de grand spectacle sont idéales pour apporter au lecteur des émotions fortes. 

Et la fin vous étonnera car Christophe Bec, scénariste aguerri, sait parfaitement renouveler ce genre très couru par le cinéma américain. 

« Survival – Warm Springs », Soleil, 56 pages, 15,50 €

Cinéma - "Presence", vue fantomatique de Steven Soderbergh

Une famille américaine emménage dans une maison. Rapidement, la fille ressent une présence. Que veut ce fantôme ? Un film fantastique stylé signé Steven Soderbergh.
Éditeur de texte enrichi, editor1


Les vieilles maisons ont toute une histoire cachée. Des secrets servant à construire des légendes, rumeurs et autres histoires fantastiques traversant les siècles pour les plus anciennes. Le nouveau film de Steven Soderbergh, intitulé Presence, se déroule entièrement dans une maison cossue d'une banlieue sans nom de l'Amérique profonde.

Au début elle est vide. Et en vente. Une commerciale reçoit les premiers visiteurs. Une famille typique. La mère, Rebekah (Lucy Liu), cadre dans une grande entreprise, le père, Chris (Chris Sullivan), pédiatre et les deux enfants encore lycéens. Chloé (Callina Liang), est de plus en renfermée, surtout depuis que sa meilleure amie est morte d'une overdose. Tyler (Eddy Maday) aime faire la fête, briller auprès des filles et nager (sa mère  l'imagine déjà en champion olympique). Visite coup de coeur.

Suite du film quelques semaines plus tard. Ils ont emménagé. Tout se passe normalement jusqu'à ce que Chloé se persuade qu'on l'observe dans sa chambre. Elle sent comme une présence. C'est le début de la prouesse du réalisateur (également directeur de la photo et monteur du film) transformant ce huis clos en lent cauchemar de plus en plus terrifiant. 

Pour que le spectateur soit totalement immergé dans l'histoire, Soderbergh a fait le pari de tout raconter au niveau de la présence, du fantôme. Tout est filmé à hauteur d'homme, en longs déplacements dans la maison. Avec parfois, une Chloé qui se met à regarder fixement la caméra, comme si elle voyait le fantôme, le spectateur.

Tout en racontant le délitement de la cellule familiale, le film dresse le portrait de ces jeunes Américains d'aujourd'hui. Ils semblent si propres, si calmes et studieux. Et pourtant...

Une réalisation stylée, jouant à merveille sur l'ambiance et le POV (point of view). Une maison, un fantôme, un drame. On retrouve un peu du propos du très beau A ghost story de David Lowery.  

"Presence", film de Steven Soderbergh avec Lucy Liu, Chris Sullivan, Callina Liang, Eddy Maday