dimanche 30 novembre 2008

BD - La fillette rêveuse de Koma

Lancée en 2003, la série Koma est apparue un peu comme un ovni dans le paysage de la BD. Signée de deux auteurs suisses (Wazem au scénario, Peeters au dessin), on y découvrait une petite fille travaillant comme ramoneur avec son père dans une ville industrieuse. C'est en descendant très profond dans les cheminées des machines que Koma découvre des êtres, noirs, aux longs bras et yeux jaunes. 

La petite fille a bien des difficultés pour communiquer avec ces êtres. Un premier album séduisant et poétique. Avec plein d'interrogation. En ce mois de novembre, le sixième et dernier tome vient clore cette série passionnante et d'une grande régularité. Koma et son père étaient bloqués dans un hôtel hors du monde. Elle a osé franchir la porte interdite et se retrouve face à la « chose » qui a tout imaginé. Un monde négatif, oppressant, sans espoir. Koma le lui dit et l'affronte. 

Au risque de faire mourir tout être vivant, la fillette va tenter d'imaginer un nouveau monde : la campagne.

« Koma » (tome 6), Les Humanoïdes Associés, 10 € 

samedi 29 novembre 2008

BD - Magiciens en lutte


Et si la magie gouvernait le monde ? Thomas Cheilan, scénariste, a développé ce principe dans une série intitulée « Salamandre ». Dans ce monde parallèle (à moins que cela ne soit le vrai et que le nôtre soit le parallèle...), en 1830, après des siècles de guerres occultes, les magiciens ont révélé leur existence et imposé une paix planétaire. Ceux qui ont refusé cette décision ont été bannis et exilés de la Terre. 

De nos jours, les tensions entre initiés et non-initiés sont fortes. La crise économique frappe la planète. Le commun des mortels voudrait que les magiciens interviennent. Mais ces derniers ont décidé de ne pas interférer dans le quotidien des mortels. Juste garantir la paix. Tout bascule quand un démon, le « Fléau », parvient à revenir sur Terre. Ezane, sorcière du clan de la salamandre va tenter d'intervenir. 

Un premier album parfois un peu bavard et complexe, mais magistralement dessiné par Dimitri Armand, à peine âgé de 25 ans.

« Salamandre » (tome 1), Le Lombard, 13 € 

vendredi 28 novembre 2008

BD - Lancelot intime


Jean-Luc Istin est un passionné des légendes celtiques. Notamment tout ce qui tourne autour d'Arthur et de la Table ronde. Sa production devient pléthorique et les éditions Soleil en ont même fait une collection à part. Nouvelle pierre à cet édifice, l'histoire de Lancelot dessinée par Alexe. 

Lancelot, fidèle d'Arthur, fier chevalier, au destin cependant très tortueux. Alors que Merlin a disparu, Claudas envahit les terres de Ban de Benoïc. Ce dernier tente de s'enfuir, mais il meurt laissant derrière lui un seul descendant. Ce sera Lancelot, sauvé par la Dame du Lac, Viviane, et élevé dans un lieu magique et secret. C'est là que le lecteur découvrira l'interprétation toute personnelle du scénariste : Lancelot serait une femme. Mais il sera élevé comme un garçon, un chevalier qui se prépare à l'affrontement. 

On se laisse rapidement entraîner dans cette histoire semblant parfois manichéenne mais qui permet pourtant de faire de nombreuses digressions tant les personnages sont en réalité complexes.

« Lancelot » (tome 1), Soleil, 12,90 € 

jeudi 27 novembre 2008

Science-fiction - De la "Permanence" des mondes

Voyage aux confins de l'espace en compagnie de Rue Cassels, jeune femme propulsée à la tête de l'équipage d'un vaisseau extraterrestre.

Même dans l'espace infini on peut se retrouver dans une minuscule prison. C'est le cas de Rue Cassels. Cette jeune femme a toujours vécu dans une base minière implantée sur un astéroïde. Sans soleil ni air naturel, elle ne connaît que sa petite chambre et les coursives glaciales. Quand sa mère meurt, elle sait qu'elle n'a plus le choix. Tyrannisée par Jentry, son frère aîné, ce dernier va certainement en profiter pour encore plus lui pourrir la vie. Elle met en place un plan d'évasion périlleux et audacieux.

Un premier fait d'arme pour Rue qui va les multiplier tout au long de ce long roman de Karl Schroeder de plus de 550 pages.

C'est en fuyant la base qu'elle va devenir immensément riche. Détectant un objet spatial errant, elle va le déclarer aux autorités et devenir ainsi propriétaire d'un cycleur gigantesque. Ce vaisseau spatial, se déplaçant presque à la vitesse de la lumière, sert de lien entre les différents mondes civilisés éloignés par des distances phénoménales. Mais pour pouvoir véritablement jouir de son bien, Rue doit l'aborder et s'en rendre maître.

Elle va recruter un petit équipage et s'élancer vers "La convoitise de Jentry" , nom clin d'oeil qu'elle a donné au vaisseau. Mais elle devra également subir les pressions des militaires car la Convoitise, contre toute attente, semble être un cycleur extraterrestre.

MONDES IMAGINAIRES

Découpé en plusieurs grandes parties, "Permanence" de Karl Schroeder offre une multitude de description de mondes imaginaires. Que cela soit avec Rue, son équipage ou quelques personnages secondaires comme Mike, le scientifique spécialisé en civilisation extraterrestre, les planètes ou habitats foisonnent. De Dis à Erythrion, le lecteur voyage dans des nuages gazeux, sous la banquise ou sur de vertes collines éclairées par un immense rayon lumineux artificiel. Et puis il y a les Autotrophes, cette espèce de conscience extraterrestre qui vit cachée, loin du tumulte.

LE DESTIN DE RUE

Ce space opéra, en s'appuyant sur des personnages très attachants, offre aussi une infinité de rebondissements, permettant au lecteur de découvrir avec Rue et Mike l'origine du cycleur extraterrestre et sa véritable signification. Et par la même occasion, le destin fabuleux de la petite Rue.

Ce troisième roman de Karl Schroeder, après "Ventus" qui l'a révélé au public français, démontre tout le talent et surtout toute l'imagination de cet auteur canadien très prometteur.

"Permanence" de Karl Schroeder. Editions Denoël Lunes d'encre. 28 euros (Folio SF, 9,40 €)

mercredi 26 novembre 2008

BD - Furia futuriste


Excellent thriller d'anticipation écrit par Runberg et dessiné par Henrichon, un Canadien surdoué, « Hostile » est un concentré d'action et de politique fiction. En 2107, les USA ont explosé en trois grandes régions après la seconde guerre de sécession. Le centre du pays est sous la botte d'une dictature religieuse. Un pays devenu pauvre qui attire les convoitises des grosses industries. 

Ainsi, le directeur d'un conglomérat industriel est pris en otage par des ouvriers chinois quand il leur annonce la délocalisation de l'usine vers le Texas. Une mission pour Helen, mercenaire se faisant payer cher. Mais pendant l'assaut, un événement va changer l'avenir du monde.

« Hostile », Dupuis, 13 € 

mardi 25 novembre 2008

BD - Troy, planète magique


Après Lanfeust et les trolls, Arleston propose la genèse du monde de Troy. Les Conquérants sont dessinés par Ciro Tota, au trait élégant et dynamique. Un regret, il est plus lent que ses collègues et il a fallu attendre trois ans pour découvrir la suite des aventures de Page Blanche et Eckmül le bûcheron. 

La jeune femme recherche ses parents. Dans son errance, elle va croiser la route du magohamoth, sorte de grosse baleine source de la magie qui irradie ce monde. Un animal très convoité et les héros auront bien des difficultés pour le protéger des sbires du consortium des fleurs. Une série véritablement magique, sérieuse et ambitieuse.

« Les conquérants de Troy », Soleil, 12,90 € 

lundi 24 novembre 2008

BD - La fin de l'exterminateur 17

Côté dessin, il est des défis plus difficiles à relever que d'autres. Quand Baranko a accepté de succéder à Bilal aux manettes de la série « Exterminateur 17 », il prenait un pari risqué. Toujours sur un scénario de Jean-Pierre Dionnet (de plus en plus rare dans la BD), il n'a gardé du mythique premier album que les traits déshumanisés de la machine à tuer. 

Cet ultime titre donne quelques clés. L'Exterminateur, retiré des affaires, est convoqué par un ponte de la mafia. Il lui propose un dernier combat contre un czar, un yakusa et un mafioso. Un affrontement qui occupe un bon tiers de l'album et dans lequel Baranko met en œuvre toute sa science du dessin en mouvement.

« Exterminateur 17 », Casterman, 13,95 € 

dimanche 23 novembre 2008

Polar - Humour noir pour "Noces de paille"

Deux petits vieux choisissent l'empaillage pour rester ensemble éternellement : un polar signé Yves Hughes.


Lukas est taxidermiste. Un bon artisan à la renommée grandissante. Il reçoit des commandes des quatre coins de la France.
Au volant de sa voiture, il est sur la route de Honfleur pour présenter quelques-unes de ses dernières créations à deux clients potentiels. Un couple de retraités, Léonce et Charlotte, désirant conserver au-delà de la mort un « petit compagnon familier » comme ils viennent de lui expliquer au téléphone. Il pleut, la visibilité n'est pas bonne et alors qu'il traverse un bois, Lukas écrase une petite bête affolée. Un furet. Un jeune. Une aubaine pour l'empailleur qui s'empresse de le récupérer.
Dans ce polar à trois personnages, Yves Hughes, l'auteur, n'y va pas par quatre chemins quand il est question des opérations techniques de taxidermie.
Ainsi quand il traite un sanglier, "Lukas le vida. Boyaux, tripes, intestins. Encore tièdes et fumants. Léonce se bouchait le nez." Car Lukas, assez rapidement, s'installe chez les deux vieux.
Ils lui ont fait une proposition incroyable lui qui croyait venir pour un chat ou un cocker. En fait son travail, s'il l'acceptait, serait d'empailler le premier des deux vieillards qui passerait l'arme à gauche. Un travail inédit, novateur, un peu de baume au cœur de Lukas à peine sorti d'une rupture sentimentale douloureuse. Il va carrément s'installer à demeure pour se tenir prêt le moment venu.
Mais les petits vieux sont résistants, très résistants. L'attente de la mort se transforme en impatience de la voir arriver.
Scénariste pour la télévision, Yves Hughes mène parfaitement ce huis clos à trois personnages, jonglant avec les caractères entiers et parfois opposés des protagonistes. Un zeste d'humour noir relève d'autant ce roman plaisant et distrayant.

"Noces de paille", Yves Hughes, Calmann-Lévy, 13, 50 €


samedi 22 novembre 2008

Thriller - Le mal personnifié

Ce thriller de Michael Prescott est dominé par le personnage de Peter Faust, un « méchant » comme on en croise rarement dans la littérature.

Deux femmes, un homme. Le triangle classique de tant de romans. Mais dans « La treizième victime » il ne s'agit pas de romantisme, loin de là. Les deux femmes sont avant tout des chasseuses. Abby Sinclair est une « bête de la jungle », Tess McCallum une « tueuse de tueurs ». Ces deux appréciations des personnalités des héroïnes sont de Peter Faust, la figure centrale de ce roman de Michael Prescott.
Peter Faust contacte Abby pour lui proposer un job. La jeune femme se charge de protéger des clients fortunés. Les protéger et parfois anticiper les ennuis. Si quelqu'un se montre un peu trop pressant, elle sait le décourager avant qu'il ne soit trop tard. Faust engage Abby car il a remarqué qu'un homme tourne autour de sa petite amie. Il charge Abby de le retrouver et de lui expliquer qu'il ne faut pas insister.

Tueur et artiste
La jeune femme, d'habitude peu regardante sur ses clients, hésite beaucoup dans ce cas présent. En raison de la personnalité de Peter Faust. D'origine allemande, il a fait la Une des journaux en Europe quand il a été jugé pour avoir assassiné une jeune femme. Pour lui, grand admirateur des nazis et du IIIe Reich, c'était une performance artistique, comme un hommage. Condamné à une courte peine de prison, une fois dehors, il a vite monnayé son « exploit », écrivant un livre et donnant des conférences. Riche, presque célèbre, il vit maintenant à Los Angeles, exhibant son intelligence sulfureuse dans ces milieux très branchés vivant dans l'opulence. Comme une mauvaise conscience pour ces faux rebelles n'osant jamais franchir le pas de la violence pure. Faust l'a fait. Depuis, il vit dessus.
Finalement Abby accepte car elle aime les défis et qu'en bonne Américaine libérale, elle estime que le client est roi, quels que soient sa personnalité et ses antécédents.
Tess a plus de principes. Normal, elle est profileuse pour le FBI. Il y a quelques années, elle a participé à un interrogatoire de Faust. Il était soupçonné d'avoir enlevé une jeune fille. Sa froide intelligence a profondément marqué Tess, persuadée que cet homme était la quintessence absolue du Mal. Mais si Tess se rend à Los Angeles, c'est pour un tout autre motif. Un agent infiltré vient d'être retrouvé assassiné. Il espionnait Faust. Abby est la principale suspecte.

L'union des ennemies
Michael Prescott, avec le même brio que dans ses précédents thrillers, anime ses deux personnages féminins récurrents. Une relation très particulière s'est installée entre Abby et Tess. La première a sauvé la vie de la seconde. Mais elle ne sont pas amies. Et sont d'accord pour admettre qu'elles ne le seront jamais.
Pourtant, face à cet ennemi commun qui va se révéler redoutable (le lecteur découvre les véritables agissements de Peter Faust par fragments), elle vont oublier leurs désaccords et rancunes pour tenter de mettre hors d'état de nuire cette machine maléfique. On apprécie particulièrement la description du cheminement de la pensée de Faust, même si parfois cela fait froid dans le dos. Ensuite, entre Abby la sauvageonne et Tess la meurtrie perpétuellement insatisfaite, le cœur du lecteur balance. Et si votre choix n'est pas fait à la fin de ce roman, rassurez-vous, Michael Prescott devrait donner une suite à leurs aventures.

« La treizième victime », Michael Prescott, Pygmalion, 20,90 €

vendredi 21 novembre 2008

BD - Huis clos perpétuel


Dans une ville de Chine (peut-être Shanghai où réside le dessinateur, Sylvain Saulne), une dizaine d'habitants d'un quartier se retrouvent sous la menace d'un groupe de militaires en rébellion. Isolés, ne sachant pas si les autorités vont venir les aider, ils se terrent, tentant de survivre. Beaucoup joueront la solution individuelle, au risque de condamner leurs camarades. Un groupe cohérent qui doit faire avec une intrus. 

Une jeune femme tatouée et très désabusée. Elle raconte son histoire sans fin. Elle ressuscite sans cesse le même jour, au même endroit. Lassée de la répétition des événements, elle tente d'en modifier le cours. Elle intervient directement ou en écartant certaines personnes. Cela marche moyennement car pour l'instant elle n'a jamais réussi à changer la fin : tout le monde meurt. 

Le scénario est de Caroline Rezo. Elle profite de la forte pagination (144 pages) pour développer sa thèse, les personnalités des protagonistes et les scènes d'action.

« Mes affinités sélectives », Casterman, 16 €