mercredi 14 juin 2023

BD - Prise de tête US avec The Blue Flame


Sam Brausam est plus connu sous le nom de The Blue Flame. Cet ouvrier frigoriste le jour, devient la nuit le superhéros qui vole grâce à ses réacteurs alimentés par un carburant se transformant en flamme bleue. Écrite par Christopher Cantwell et dessinée par Adam Gorham, The Blue Flame est très loin des histoires classiques de Marvel ou DC. Blue Flame, et tous ses compagnons héros, sont pris dans un attentat. Des dizaines de morts. Il est le seul à s’en sortir, mais marche désormais avec des béquilles.

Quand il remet son costume, il va jusqu’aux confins de l’univers et se retrouve prisonnier d’un conglomérat de nations extraterrestres. Il vient d’être désigné avocat des Humains. S’il persuade le jury, la Terre ne sera pas détruite.

La BD, dense, qui fait d’incessants allers-retours entre le tribunal, avant et après l’attentat, se transforme en traité philosophique. Mais les dessins superbes et l’évidence des réactions de Blue Flame transforme le tout en petit chef-d’œuvre qui passionnera tous ceux qui parfois se posent des questions sur notre place dans l’univers.

« The Blue Flame », 404 Éditions, 26,50 €


mardi 13 juin 2023

BD - Bombardiers de légende durant la seconde guerre mondiale


Après les chars ou les batailles navales, ce sont les avions de guerre qui ont leur propre collection de BD. Avec Nolane au scénario, après le Stuka allemand, c’est au tour du B-25 Mitchell américain d’être glorifié dans cet album dessiné par Aleksic.

Ce bombardier, encore en phase de test lors de l’attaque de Pearl Harbor, a servi de couteau suisse tout au long de la guerre du Pacifique. Mais il a surtout permis aux Américains de reprendre un peu confiance en frappant le Japon quelques semaines après l’attaque surprise. Avec réservoirs supplémentaires, moins d’armes pour alléger et des bombes puissantes, une vingtaine de ces avions ont décollé d’un porte-avions pour déverser un déluge de feu sur les installations militaires nippones.

C’est cette expédition, risquée, totalement folle, qui est racontée dans cet album héroïque. Notamment après l’attaque, quand les avions ont rejoint vaille que vaille la Chine pour sauver les équipages. Une BD à conseiller aux amateurs de batailles aériennes réalistes.

« Warbirds » (B-25 Mitchell – Tonnerre sur Tokyo), Soleil, 15,50 €

lundi 12 juin 2023

BD - La Légion étrangère et Camerone au centre de cet album

Formidable destin que celui de Casimir Laï, orphelin des rues, malmené par la vie mais qui trouve une seconde chance en intégrant la Légion étrangère. Le héros de cette série historique écrite par Jean-Yves Yerlès et dessinée par Marc-Antoine Boidin, est en fâcheuse posture. Un de ses pires ennemis vient lui aussi de rejoindre le corps expéditionnaire de l’armée française.

La tension est forte en Afrique du Nord. Elle n’ira qu’en augmentant quand les soldats partent pour le Mexique. Sous la conduite du capitaine Danjou, ils vont aller sécuriser la route entre un port et une garnison. Une petite fortune va être convoyée. C’est sur cette route, perdue, loin de tout, que Casimir et ses amis tombent dans une embuscade. Ils se réfugient dans le hameau de Camerone. La suite appartient à l’Histoire de la Légion. C’est donc au plus près des combattants que l’on suit ce combat épique, héroïque.

Mais l’album va un peu plus loin car il y est aussi question des conditions sanitaires de l’arrivée des Français au Mexique, notamment de l’épidémie de fièvre jaune, le fameux vomito negro longuement expliqué dans un cahier scientifique en fin de volume.

« Legio Patria Nostra » (tome 3), Glénat, 14,50 €

dimanche 11 juin 2023

BD - Sauver les aviateurs alliés avec « Le Réseau Comète »


La Résistance en France durant la seconde Guerre mondiale a pris de nombreuses formes. Certains ont pris les armes, d’autres ont attendus le dernier moment pour changer de camp. Et puis il y a les discrets, ceux qui ont essentiellement œuvré pour aider les Alliés. Pas d’armes, pas d’éclats, mais des risques énormes et souvent la prison, la déportation voire la mort devant un peloton d’exécution.

Dans ce récit très détaillé, en partie basé que les souvenirs de la plus jeune membre du réseau, Jean-Yves Le Naour raconte comment, de Bruxelles à l’Espagne, des hommes et des femmes ont pris tous les risques pour permettre à des aviateurs alliés, abattus au-dessus de l’Europe, de revenir vers Londres et de repartir au combat. Cachés chez l’habitant, ils avaient de faux papiers pour traverser la France en train.

Mais arrivé à la frontière entre la France et l’Espagne, côté Pays basque, il fallait passer par les chemins de contrebande et éviter les nombreuses patrouilles allemandes. Marko et Holgado, deux dessinateurs originaires de la région (le premier est Français, le second Espagnol), ont dessiné les exploits de ces résistants de l’ombre. Un devoir de mémoire bienvenu alors que les derniers témoins vivants sont en train de disparaître.

« Le Réseau Comète », Bamboo Grand Angle, 14,90 €

samedi 10 juin 2023

BD - Un témoignage dans le "Journal d’une invasion"


Igort, dessinateur italien, a déjà signé deux ouvrages sur la Russie et l’Ukraine. Quand il apprend l’attaque russe contre Kiev, il décide de raconter cette invasion sous forme de BD.

Marié à une Ukrainienne, il connaît parfaitement les lieux. Il ne peut pas s’y rendre mais recueille de nombreux témoignages au téléphone.


Dans ces 168 pages, on découvre le quotidien de simples civils, de militaires ukrainiens mais aussi de jeunes Russes, embarqués avec leur unité dans une guerre qui semble partie pour durer encore de trop longues années. Des témoignages essentiels alors que cela fait plus d’un an que le pays est pris en tenaille par les forces russes, qu’il résiste et envisage même de lancer une contre-offensive.

« Journal d’une invasion », Futuropolis, 24 €

vendredi 9 juin 2023

BD - Quand Tebo revisite l’univers des Schtroumpfs


Il est des univers compliqués à modifier. On pensait que les Schtroumpfs imaginés par Peyo étaient inamovibles. Et puis le petit génie Tebo s’empare des petits bonshommes en bleu et tout devient évident. De série un peu simpliste, moralisatrices et aux dessins de plus en plus figés, il en fait une aventure désopilante, dynamique et très novatrice. Les puristes vont s’étrangler, tous les autres (la grande majorité des lecteurs de BD intelligente) vont apprécier.

Tout commence par la chute d’un Schtroumpf du haut du toit d’une maison champignon. Quand il se réveille, un collègue lui demande s’il va bien. Mais comme il ne parle pas le schtroumpf (en clair il remplace un mot sur deux par « Schtroumpf »), le nouveau ne comprend pas. Le village doit rapidement de rendre à l’évidence, ce Schtroumpf n’est pas d’ici.


Qui est-il ? C’est la question qui va servir de fil rouge à cet album de 56 pages, avec une incroyable révélation dans les dix dernières pages.

Pour retrouver l’origine de ce Schtroumpf mystère, Costaud, Lunettes et la Schtroumpfette vont aller explorer les environs en sa compagnie, se retrouver aux prises avec un poisson carnivore, une chauve-souris agressive, un dragon et une poule idiote. Sans oublier le nouveau méchant de la série : l’alchimiste Haltegadin. Une reprise hommage qui devrait être la norme.

« Qui est ce Schtroumpf », Le Lombard, 11,50 €

jeudi 8 juin 2023

Cinéma et littérature - Les lettres de François Truffaut à Helen Scott, son agent américaine


Entre 1960 et 1965, François Truffaut a entretenu une correspondance avec Helen Scott, son agent aux USA. Dans Mon petit Truffe, ma grande Scottie, commenté et annoté par Serge Toubiana, on découvre la vision du cinéma américain par le réalisateur français. Il y est beaucoup question de Hitchcok et des grands maîtres.

Mais ces lettres montrent surtout la grande complicité entre cette femme enjouée, au service de la promotion du cinéma français en Amérique et un Truffaut sensible à son admiration et surtout sa grande connaissance du milieu. (Denoël, 24,90 €)

mercredi 7 juin 2023

BD - "Supercanon", le rêveur de conquête spatiale devient marchand d'armes



Le jeune Gerry est un surdoué. Maths, physique et chimie n'ont pas de secret pour cet enfant précoce. Un petit garçon vite orphelin. Mais le jeune Canadien est recueilli par sa tante et va pouvoir intégrer de grandes écoles. Un scientifique qui ose rêver, tel est le thème central de Supercanon !, roman graphique signé du Québécois Philippe Girard. 

La lecture des romans de Jules Verne (dans les années 30), lui donne l'envie de conquérir les étoiles. Et il est persuadé que l'utilisation de canon géants, comme imaginé par le romancier français,  est la solution à tous les problèmes. Il va rapidement se lancer dans des recherches pour le gouvernement canadien, sous le regard de plus en plus intéressé des Américains. Il n'arrivera pas à toucher la lune, mais sa connaissance de la balistique le propulse excellent fabricant de canons. 

Et pour atteindre les étoiles, il faut de l'argent, beaucoup d'argent... Gerry va créer une entreprise et fabriquer des canons surpuissants, d'une rare efficacité, engrangeant des millions de bénéfices. Problème, le rêveur est peu regardant sur ses acheteurs. Afrique du Sud, Israël, Irak... il est de tous les conflits locaux. 

La CIA ne va pas apprécier et il sera condamné à quelques mois de prison. Ruiné aussi... Il va tenter de tout recommencer depuis sa filiale belge qui a échappé à la banqueroute. Bruxelles, capitale de l'espionnage et des meurtres politiques.  

"Supercanon !", Casterman, 152 pages, 24 €

mardi 6 juin 2023

Un roman d’horreur - Le clown et le maïs


Amateurs de littérature de genre, réjouissez-vous, Sonatine fait désormais dans l’horreur. Un clown dans un champ de maïs d’Adam Cesare est un bel hommage aux films d’horreur des bouseux américains.

Quand une petite famille de la grande ville débarque à Kettle Springs, bled paumé du Missouri, elle remarque surtout les dessins de Frendo dans la rue, un clown pas spécialement marrant. Quand quelqu’un déguisé en Frendo décide de se lancer dans un grand massacre, Quinn, l’héroïne, va regretter d’avoir suivi son père dans ce déménagement.

Dans des champs de maïs infinis, elle va devoir beaucoup courir pour tenter d’échapper à cette future star de la littérature d’horreur.

« Un clown dans un champ de maïs », Adam Cesare, Sonatine, 20,90 €

lundi 5 juin 2023

Poches - Olivia Ruiz raconte Carmen dans "Ecoute la pluie tomber"


Escota quand plóu
en occitan, Écoute la pluie tomber en français, tel est le titre du second roman d’Olivia Ruiz. L’Audoise, après le succès fulgurant de son premier livre témoignage, la commode aux tiroirs de couleur, prolonge l’histoire romancée des femmes de sa famille. On retrouve Rita, le café de Marseillette mais surtout Carmen, personnage central de cette histoire qui va de Narbonne aux environs de Madrid, parle de danse, de tauromachie, de traversée de l’Atlantique en paquebot et de mort prématurée. Carmen, une de sœurs Ruiz, est la plus libre. Elle se rend utile en nettoyant l’hôtel-restaurant de Marseillette, et profite de la vie en se donnant aux garçons de la région. Une féministe indépendante avant la lettre. Pas forcément heureuse de son sort, mais trop humaine pour rejeter cette vie familiale.

« Ce café c’est aussi le mien. C’est là que j’ai commencé à dévorer la vie avec mon appétit d’ogresse. […] J’essaie de m’en extraire, mais il est irrésistible, ce café, avec sa galerie de gueules cassées. Ce sont des figures. Des atypiques. Des authentiques. Chargés de leur terre, d’une histoire. Et riches des enseignements qu’elles leur ont laissés. »

Il y a donc toute une partie sur cette Aude si attachante dans le roman. Mais la vie de Carmen bascule quand un matador madrilène fait étape à l’hôtel. Elle partira avec lui, vivre quelques mois dans son hacienda où il forme des jeunes, élève des toros… et trafique avec la mafia. Elle finira en prison. Pas facile les geôles pour femmes sous Franco. C’est la partie dure du roman, même si Carmen en ressort radicalement changée :

« J’ai beaucoup lu. Moi qui suis peu causante et qui ne m’intéressais à rien ni personne, ça m’a permis de rester en vie. De ne pas céder aux idées noires qui m’envahissaient. »

Ensuite, à son retour à Marseillette, Carmen va retrouver le petit Escouto. Un gitan, quasiment muet qui ne sait dire que « Escota quand plóu » d’où son surnom, qui a longtemps travaillé sur un paquebot. Malgré la différence d’âge, c’est une belle histoire d’amour qui se noue avec Carmen. Une note d’espoir dans un roman plein de bruit, de fureur et de passion.

« Écoute la pluie tomber » d’Olivia Ruiz, Le Livre de Poche, 7,70 €