dimanche 2 octobre 2011

BD - Ursula, une femme fragile partage ses tourments dans un album de Fred Bernard


Rousse aux yeux verts, Ursula est strip-teaseuse dans un bar en Bourgogne. Sa vie n'est pas un long fleuve tranquille, et c'est peut-être pour cela que Fred Bernard a décidé de la raconter. Plus habitué aux histoires pour enfants, il signe un roman graphique presque entièrement réalisé aux crayons de couleur. 

Cela donne un faux air de conte pour petite fille alors que l'existence d'Ursula est tout sauf une belle histoire. 

D'origine polonaise, brimée dans une institution catholique, elle est adoptée à 8 ans par un couple de riches vignerons bourguignons. Elle pourrait tranquillement reprendre l'exploitation familiale mais sa crise de l'adolescence et son amour de la danse la poussent à faire le show sur les comptoirs de bars. 

Montrer ses fesses, qu'elle a très belles, lui permet de gagner vite sa vie. Même si une grande partie de l'argent part en alcool et en drogue. Fred Bernard a réellement connu Ursula. Le roman est aussi reportage. L'auteur se met en scène en fou tentant de la raisonner. Une œuvre à part, suite de ses précédentes BD adultes parues chez Casterman.

« Ursula vers l'amour et au-delà », Delcourt, 17,50 € 

samedi 1 octobre 2011

BD - Toute la bande à Lucien de retour dans le tome 11 des déboires du vieux rocker de Margerin


Vous avez découvert cet été dans les pages de Centre Presse et Midi Libre et en avant-première quelques-uns des récits complets formant ce 11e tome des péripéties de Lucien et de sa bande. Frank Margerin a toujours la banane et malgré le poids des ans et les cheveux blancs, il garde son humour rock et bon enfant. 

Lucien a vieilli, il est maintenant casé, avec femme et enfant. Mais il a toujours les mêmes potes, ceux de sa bande qui ont écumé durant quelques années les festivals rock de France et de Navarre (Margerin était d'ailleurs encore la semaine dernière à Perpignan pour le Festival international du disque et de la Bande dessinée). Eux aussi ils ont évolué et se sont reconvertis. Riton, par exemple, a trouvé le petit boulot idéal pour arrondir sa retraite de fonctionnaire. Gardien dans un musée, il s'investit complètement dans ce milieu culturel. Mais essentiellement pour draguer les jeunes étudiantes des Beaux-Arts.

Retraite, maladie, anniversaires ou écologie sont également au sommaire de ces 11 histoires courtes qui sont très loin de ne s'adresser qu'aux vieux rockers nostalgiques.

« Lucien » (tome 11), Fluide Glacial, 10,40 €  

vendredi 30 septembre 2011

L'hôpital et ses monstres : le nouveau San-Antonio de Patrice Dard décape les zygomatiques

Quand San-Antonio met les pieds dans un hôpital, le trou de la sécu n'a plus qu'à compter ses abattis car les malades se transforment en morts !


Qu'on le veuille ou non, les nouvelles aventures de San-Antonio rédigées par Patrice Dard, n'ont rien perdu de leur truculence ni de leur régularité. « Comme sur des roulettes » est le second titre à paraître cette année chez Fayard. Le héros, toujours le cœur sur la main, décide d'accompagner sa maman au chevet de Bérurier. L'adjoint au sexe gigantesque est terrassé par une crise de goutte. Rien d'étonnant quand on sait les quantités de cochonnailles et de picrate ingurgitées par l'ogre du quai des Orfèvres. L'intrigue est lancée par la curiosité maladive de San-Antonio. En descendant du bus et en jetant ses tickets, il remarque dans la poubelle un cahier rouge. Et le subtilise. Dans la minute qui suit, un infirmier farfouille dans la poubelle et retourne dans l'hôpital, soucieux. Sentant l'embrouille, le flic le plus célèbre de France le suit et débarque dans le service RTT. N'allez pas croire que des salariés français tombent malade de devoir moins travailler (San-Antonio c'est de la fiction mais faut quand même pas exagérer). RTT veut dire « recherche en thérapie tératologique ». Et des monstres, s'il n'y en a pas beaucoup dans ce petit service, ils sont particulièrement difformes et effrayants.

C'est pas pour me vanter, mais des histoires tordues j'en ai lues des centaines dans ma carrière de petit chroniqueur littéraire provincial. Et cette fois encore, Patrice Dard parvient à m'étonner. L'infirmier est retrouvé mort, enfermé dans un placard, un bistouri dans le ventre. Le cahier rouge semble être la cause de ce décès, mais San-A se le réserve pour un peu plus tard, comme un atout planqué dans la manche. Après, les péripéties s'enchaînent avec maestria : action, poursuite, baston, rebondissements. Manque les traditionnelles dites « de cul ». Exactement elles sont dissociées du récit. L'auteur explique dans un avertissement que « suite à la misérable embrouille DSQ (ce Strauss qui préfère le frotti-frotta à la valse), j'ai décidé de rester prudent vis-à-vis du sexe. J'ai jugé préférable de rassembler toutes les séquences olé olé à la fin de l'ouvrage, dans un chapitre spécial que tu pourras arracher afin de les soustraire à la lecture de tes bambins déjà presque aussi concupiscents que toi. »

Lourdes et ses miraculés

On aura beau dire, un polar français sans scène se déroulant en province c'est un peu comme un roman de Katherine Pancol sans répétition : ça manque de crédibilité. L'équipe de San-Antonio, les méchants et quelques monstres en goguette vont faire un tour à Lourdes, cité de Bernadette et des marchands du temple, chassés en leur temps de Jérusalem par un certain Jésus. La vision de cette débauche de religion nous fait un peu penser aux scènes du « Miraculé », superbe film (un pléonasme de plus...) de Jean-Pierre Mocky. Et ça file un peu le bourdon au commissaire qui est beaucoup plus philosophe depuis sa reprise en mains par le fiston Dard.

« Si on réfléchit bien, il faudrait arrêter de réfléchir pour être heureux. Moi ce qui me gangrène la vie, ce sont mes idées, mes pensées, mes envies, mes dégoûts. Tout ce qui agite mon esprit sans jamais l'apaiser. (…) J'aspire au froid de mes sentiments, à la rigidité cadavérique de mes sensations, à la paix de la viande, laquelle passe toujours, hélas, par l'extinction des feux de l'âme. » Il est triste San-Antonio, voire dépressif ? Non, simplement un peu fatigué après un peu plus de 200 romans menés tambour battant. Mais ce bref séjour à l'hôpital devrait lui redonner un peu de vitalité.

« Comme sur des roulettes », Patrice Dard, Fayard, 6,90 € 

jeudi 29 septembre 2011

BD - Le come-back de Choc au menu du 10e tome de l'intégrale Tif et Tondu

Beau succès de la collection des « Intégrales » des classiques Dupuis, la reprise des aventures de Tif et Tondu en est déjà à son dixième volume. Will est toujours au dessin (et au sommet de son art) et Desberg, au scénario, obtient enfin l'autorisation de reprendre le personnage du méchant absolu : Monsieur Choc. 

La figure de ce bandit distingué, en smoking, heaume d'acier cachant son visage, a été créé par Rosy. Après une longue éclipse, il revient donner un peu de piquant aux enquêtes du barbu et du chauve. Un dossier d'une vingtaine de pages, signé Didier Pasamonik, explique les conditions de cette reprise et les difficultés de l'époque des éditions Dupuis. Reste le plaisir des yeux : les femmes de Will, grandes, filiformes, les yeux en amandes et les lèvres pulpeuses. Un régal qui n'a pas pris une ride.

« Tif et Tondu, l'intégrale » (tome 10), Dupuis, 19,95 € 

mercredi 28 septembre 2011

BD - Marie-Antoinette, « La reine fantôme» de Rodolphe et Goetzinger

Annie Goetzinger, pour une fois, fait une infidélité à son scénariste préféré (Pierre Christin) pour un roman graphique écrit par Rodolphe. Une passion commune des fantômes leur a inspiré cette histoire de femme peintre habitée par le spectre de Marie-Antoinette. C'est en peignant le décor bucolique des jardins du Trianon que Maud de Brunhoe découvre ses talents de médium. 

Dès lors elle sera toujours accompagnée par le fantôme de la reine décapitée. Un esprit qui ne peut plus trouver le repos éternel et qui découvre avec étonnement la vie culturelle française de ces années 30 foisonnantes. Un récit de femmes permettant à la dessinatrice de l'Agence Hardy de signer des planches en couleurs directes d'une grande beauté.

« Marie-Antoinette, la reine fantôme », Dargaud, 14,95 € 

mardi 27 septembre 2011

BD - « La fille de Paname » ou la vie tumultueuse de Casque d'or


Nom : Elie, prénom : Amélie, surnom : Casque d'or. Laurent Galandon (scénario) et Kas (dessin) retracent la vie de la célèbre figure des rues parisiennes dans « La fille de Paname ». Amélie, fille de blanchisseuse, belle et audacieuse, ne veut pas de la vie miséreuse de sa mère. 

Tombée amoureuse de Matelot, serrurier de son état, elle le quittera quand il voudra se marier avec elle et avoir des enfants. Amélie ne veut pas d'une vie normale. En rencontrant la Belle-Hélène, tapineuse de son état, elle découvre un nouvel amour et un métier plein d'avenir. Casque d'or vient de naître, avec son cortège de clients, de souteneurs et de malheurs. 

Une BD d'une qualité graphique indéniable, au service d'une histoire entre joies et larmes.

« La fille de Paname » (tome 1), Le Lombard, 15,95 €

lundi 26 septembre 2011

BD - Une nouvelle guerre froide risque de se déclarer dans la saison 2 d'Empire USA de Desberg

Amateurs de conspiration, de politique fiction et de théorie du complot la saison 2 de « Empire USA » est pour vous. Desberg semble avoir trouvé la formule qui lui convient. Tout en conservant la contrainte de l'album de 46 planches, il maintient le rythme en faisant dessiner chaque épisode par un dessinateur différent. Ainsi viennent de paraître les deux premiers titres avec Reculé et Queireix au dessin. Jared Gail a quitté la CIA et est désormais au service d'un milliardaire américain. 

Son passé (la saison 1) remonte à la surface quand il reçoit un SMS de Duane, son ancien équipier. Un ultime message car le jeune agent vient d'être abattu dans le bureau d'un avocat anglais. Jared va officieusement reprendre du service et aller enquêter sur place. Une plongée dans « Londongrad », cette ville dans la ville où les millions des oligarques russes circulent sans limites. 

Certains Russes qui veulent retrouver leur prestige d'antan, quitte à déclencher une nouvelle guerre froide.

« Empire USA saison 2 » (tomes 1 & 2), Dargaud, 11,95 € Le tome 3 paraîtra le 14 octobre. 

dimanche 25 septembre 2011

BD - La fuite de Park : nouvel épisode d'AlterEgo, la série BD qui peut se lire dans le désordre


AlterEgo, série multiple écrite par Renders et Lapière, se dévoile encore un peu plus avec la parution de cette quatrième histoire. Le lecteur suit cette fois les péripéties centrées autour de Park. 

Un jeune pêcheur coréen, enlevé et enfermé dans un asile psychiatrique de luxe aux Bermudes. Drogué quotidiennement pour qu'il oublie ses soucis et son passé, il reprend petit à petit pied dans la réalité quand il cesse de boire les jus de fruits contaminés. Il se souviendra de sa femme, de sa fille et de sa grand-mère. Il tentera alors de fuir mais réalisera rapidement que ce ne sera pas une mince affaire. Il croisera dans sa cavale Fouad au centre d'un précédent album. 

Et cette histoire est aussi l'occasion d'en apprendre un peu plus sur Noah et Jonas, les deux prochains personnages de cette série à part, chaque titre pouvant être lu indépendamment des autres et dans n'importe quel ordre. Une superbe réussite à mettre également à l'actif du dessinateur principal, Reynès.

« AlterEgo » (tome 4), Dupuis, 11,95 € 

samedi 24 septembre 2011

BD - La perle pourpre ou l'histoire d'un bordel en 1887, nouveau pari d'Arleston chez Glénat


A Paris en 1887, la Tour Eiffel est en pleine construction (et polémique), Ferdinand de Lesseps cherche des millions pour construire le canal du Panama et Chimère, fillette de 13 ans est mise aux enchères à la Perle pourpre, maison close réputée. Exactement, c'est sa virginité qui est proposée au plus offrant. Loin des gags désopilants des Trolls ou des aventures de Lanfeust, Arleston a repris son véritable patronyme, Pelinq, pour signer le scénario d'une nouvelle série entre érotisme et lutte sociale. 

Aidé de Mélanyn et de Vincent au dessin, il décrit cette petite société où les filles ne sont que des marchandises, louées pour quelques heures par les grosses fortunes du moment. Des poupées de chair fraîche avec qui tous les jeux sont permis. 

Mais Chimère, malgré son jeune âge, semble parfaitement au fait des mœurs de sa nouvelle demeure et on devine, à l'issue de ce premier tome, qu'elle a une idée derrière la tête la poussant à accepter sans broncher ces multiples humiliations.

« Chimères 1887 » (tome 1), Glénat, 13,50 € 

vendredi 23 septembre 2011

Roman jeunesse - Le Léviathan de Scott Westerfeld poursuit sa route à la rencontre du Béhémoth

Il est des univers littéraires qui longtemps après la dernière page tournée continuent à vous faire rêver. Léviathan, la nouvelle saga imaginée par Scott Westerfeld (Ugglies, Midnighters) est de cette veine. Un an après la publication du début des aventures de Deryn et Alek, les deux jeunes héros sont de retour dans un copieux volume de 500 pages richement illustré et intitulé « Béhémoth ». Ce récit d'histoire alternative se déroule en 1914, à l'aube de la grande guerre. L'empire allemand a des envies d'expansion malgré sa prise en tenaille entre les britanniques et les Russes. Tout l'intérêt du récit, directement inspiré des véritables événements, est de présenter une société ayant évolué différemment. Les Anglais ont développé le Darwinisme ou l'art de créer des animaux utiles alors que les Allemands, les clankers, tirent leur puissance de la fabrication de machines.

Deryn, orpheline, se fait passer pour un garçon pour servir sur le Léviathan, un « souffleur d'oxygène », sorte de baleine des airs transformée en forteresse volante. A son bord le jeune Alek, prince héritier de l'empire austro-hongrois, y a trouvé refuge en fuyant les Allemands. Dans ce second tome, on retrouve le vaisseau amarré au-dessus de Constantinople. Les diplomates anglais ont pour mission de rallier les Ottomans. C'est dans cette ville cosmopolite, véritable nid d'espions et de traitres que l'intrigue se déroule. On y croise par exemple « des golems de fer. Ils protègent le quartier juif. » Ce sont des « mécanopodes à la silhouette quasi humaine. Ils avaient des jambes courtaudes, de longs bras et des visages lisses. Ils étaient ornés d'étoffes rayées et de symboles étranges, et ne portaient aucune arme dans leurs mains griffues. »

Les bonnes raisons pour lire Béhémoth sont légion, de la relation de plus en plus amicale entre les deux héros à la découvertes de nouveaux animaux comme ces loris perspicaces aux pouvoirs étonnants. Quant au Béhémoth qui donne son nom au livre, vous devrez attendre les derniers chapitres pour le voir en action. Mais vous ne le regretterez pas !

« Béhémoth » de Scott Westerfeld, Pocket Jeunesse, 19 €