vendredi 24 janvier 2025

BD - La fin du Duce racontée en détail


La dernière photo de Mussolini, le Duce, est terrible. Le dictateur est exhibé, pendu par les pieds après son exécution. Il est accroché à côté de sa maîtresse, Clara Petacci, elle aussi fusillée quelques heures auparavant sur les bords du lac de Côme. Une ultime photo qui résume La dernière nuit de Mussolini racontée par Jean-Charles Chapuzet, scénariste et historien, et dessinée par Christophe Girard.


Ce sont exactement les trois derniers jours de fuite dans la région qui sont détaillés dans ce roman graphique historique. Et pour mieux comprendre, les auteurs proposent des retours en arrière, expliquant l’évolution politique du Duce (de socialiste à fasciste) et son arrivée au pouvoir après une alliance avec Hitler. Grand séducteur, il a multiplié les conquêtes et les enfants, souvent illégitimes.

Rien ne l’arrêtait. Du moins jusqu’à l’avancée des troupes alliées et la volonté de vengeance des compagnons de ces milliers d’opposants assassinés lors de son règne.

Le destin tragique d’un homme présenté comme profondément patriote, parfois un peu lâche, totalement dépassé par les événements à la fin de sa vie.
« La dernière nuit de Mussolini », Glénat, 128 pages, 21,50 €

jeudi 23 janvier 2025

BD - Jack Gilet, bourreau itinérant américain

Très beau et passionnant roman graphique signé par David Ratte, auteur prolixe installé depuis de nombreuses années dans les Pyrénées-Orientales. Jack Gilet, le héros, a hérité de la charge de son père : bourreau. Dans l’Amérique du début du XXe siècle, le travail ne manque pas. Mais Jack est un sensible. Tuer des hommes ou des femmes, il ne peut pas. Il s’est reconverti en bourreau d’animaux.

Il sillonne l’Amérique rurale, pour exécuter les sentences parfois étonnantes contre une vache belliqueuse, un chien agressif, voire un cochon affamé (il a mangé un nourrisson…). A Flagstone, petite ville peuplée de « péquenaud », dixit Jack Gilet, en plus d’une truie, il doit pendre une chèvre coupable d’avoir envoyé par-dessus le parapet d’un pont un homme qui s’en prenait à sa propriétaire, Winifred, jeune sauvageonne. Malgré les pleurs de la jeune fille lors du procès, l’animal est condamné. Jack officie et repart vers une nouvelle mission. Winifred, en rage, décide de le suivre et de se venger. Cette longue course-poursuite à travers les superbes paysages des USA encore sauvages, est une plongée dans les consciences de deux personnages.

Si Jack peut tuer des animaux sans s’émouvoir, au contraire, Winifred les trouve plus attachants que les hommes dont on peut se débarrasser sans problème.

Une belle histoire, pleine de rebondissements, portée par des planches d’une exceptionnelle beauté, en couleurs directes à l’aquarelle.
« À la poursuite de Jack Gilet », Bamboo Grand Angle, 128 pages, 19,90 €

mercredi 22 janvier 2025

Cinéma - Le secret du père de “La fille d’un grand amour”

Le premier film d’Agnès de Sacy, « La fille d’un grand amour », avec François Damiens et Isabelle Carré a été en grande partie tourné dans les Pyrénées-Orientales, au pied des Albères.

Retour aux sources pour Agnès de Sacy, scénariste de cinéma depuis une vingtaine d’années. Elle s’inspire de son histoire familiale pour réaliser son premier long-métrage, La fille d’un grand amour. Un film mélodramatique, avec François Damiens et Isabelle Carré en vedette, tourné en grande partie à Bages et Perpignan à l’automne dernier. Une histoire qui tourne autour du coup de foudre mais aussi des secrets de famille et des vies cachées, voire gâchées.

Le sujet est né au début des années 90, quand Agnès de Sacy, élève à la FEMIS, la prestigieuse école de cinéma parisienne, réalise un film dans le cadre de son cursus étudiant sur le thème « Filmer vos parents ». Elle interroge son père et sa mère sur leur première rencontre à la fin des années 50 dans une boutique parisienne. Ce documentaire, elle va en montrer, au début du film, la fabrication, avec deux comédiens dans le rôle des parents. François Damiens est Yves, le père, Isabelle Carré, Ana, la mère. Ils racontent ce coup de foudre, donnent deux versions assez différentes de cette première rencontre. Mais au moment du film, cela fait longtemps qu’ils sont divorcés.

Un mas au pied des Albères

Nous sommes au début des années 90, Yves travaille dans une banque à Paris, Ana est antiquaire dans la région de Perpignan dans un grand mas au pied des Albères. Ce film va être le bon motif pour permettre à Yves de passer un week-end en Catalogne, découvrant la nouvelle vie de son ancienne épouse. Retrouvailles qui vont rapidement virer à la dispute. La suite, racontée (subie plus exactement) par Cécile (Claire Duburcq), la fille, double fictionnel de la réalisatrice, est pleine de rebondissements, de drames, de lourds secrets (notamment de la part d’Yves) et de moments de joie.

Très personnelle, cette histoire de famille compliquée, a été tournée en grande partie dans la maison même du père de la réalisatrice. Un superbe mas, avec vue sur les Albères, régulièrement montrées dans le film quand François Damiens et Isabelle Carré se promènent dans les vignes alentour. Une région qu’Isabelle de Sacy connaît bien, sa famille maternelle ayant toujours vécu là. Elle y a passé de nombreuses vacances, enfant. Elle y aime notamment la lumière, unique. Et effectivement, ce film est lumineux, de plus en plus éclairé par ce grand amour et la libération, par la parole et l’écrit, de la mère et du père d’Agnès de Sacy.

Film d’Agnès De Sacy avec Isabelle Carré, François Damiens, Claire Duburcq


Agnès de Sacy : “Un amour passionnel”


Venues présenter en avant-première, début décembre, le film au cinéma Castillet de Perpignan, Agnès de Sacy et son interprète, Isabelle Carré, sont longuement revenus sur ce film qui les touche professionnellement et personnellement.

Isabelle Carré : « Le film raconte le fait qu’on a droit aux secondes chances. Mon personnage y croit. Elle a une sorte de foi qu’elle s’est construite elle-même. Elle croit qu’en étant libre, dans la tolérance, c’est possible. »

Agnès de Sacy : « Ce sont deux personnes qui ont eu une histoire singulière, c’est leur histoire. Il y a des personnes séparées qui ne se retrouveront jamais, qui refont leur vie. Il se trouve qu’eux deux, sont deux personnes qui ont eu un amour tout à fait singulier et extrêmement passionnel. »

Isabelle Carré : « J’ai beaucoup évolué grâce à l’écriture de romans. Je n’ai aucune frustration à être au service des auteurs, mais il était temps pour moi de dire mes mots. Raconter mes propres histoires m’a aidé à trouver une autre voix, à changer, évoluer et acquérir de la confiance. »

Agnès de Sacy : « François Damiens est un grand émotif, un hypersensible et c’est un homme dans sa maladresse qui est bouleversant. Je voulais, sans aucun mot, qu’on comprenne pourquoi cette femme l‘aime. En face j’avais Isabelle Carré qui est une Rolls, une actrice d’une précision, d’une rapidité et d’une intelligence rares. Les réunir m’a paru évident. »

À propos de la maison du tournage : « C’est un personnage. Je l‘ai cherchée avec mon chef opérateur et ma décoratrice, se souvient Agnès de Sacy. On a visité plusieurs mas dans la région pour finir par tourner dans la maison où habitait mon père et qui était évidemment celle qui m’inspirait quand j’écrivais. On était en repérage et on dormait à la maison et à chaque fois qu’on revenait, mon père me demandait « Mais pourquoi vous ne tournez pas ici ? » Il revenait dessus en me taquinant. Et puis l’équipe m‘a convaincue. C’est un grand bonheur de tourner dans un espace qu’on connaît intimement. »

mardi 21 janvier 2025

En vidéo, “Le roman de Jim” des frères Larrieu

Cette histoire, d’un presque père ballotté par les sentiments et les événements, fait du bien. Adapté du livre de Pierric Bailly, Le roman de Jim des frères Larrieu dresse le portrait d’une génération sensible et à l’écoute. Un amant gentil, présent et dévoué interprété par Karim Leklou.

L’amour qu’il porte à sa compagne enceinte (Laetitia Dosch), va se communiquer à ce petit garçon qu’il va accompagner dans ses premières années de la vie. Un film d’une beauté absolue, parfois jubilatoire, parfois triste. Comme la vie. Juste la vie.

L’édition en vidéo chez Pyramide sortie cette semaine offre une profusion de bonus pour aller plus loin dont des entretiens avec Arnaud et Jean-Marie Larrieu (27 min), l’écrivain Pierric Bailly à propos des lieux du tournage (15 min) ou Karim Leklou (18 min)

lundi 20 janvier 2025

Roman - « Vous parler de mon fils », texte poignant sur le harcèlement scolaire

Vincent veut se souvenir de Hugo, ce fils qu’il vient de perdre. Il se sent coupable de ne pas avoir compris la situation. Le roman de Philippe Besson est un réquisitoire contre ce harcèlement scolaire sournois et trop souvent sous-estimé.


Alors que  des millions d’enfants viennent de reprendre le chemin de l’école, des collèges et lycées. Un lieu de savoir où malheureusement s’épanouit aussi une forme de terrorisme insidieux : le harcèlement scolaire. Car parmi les cohortes de jeunes, certains auront la boule au ventre, persuadés que leur cauchemar, mis sous l’éteignoir durant les vacances de fin d’année, va reprendre de plus belle. Combien parmi eux ne verront pas les beaux jours du printemps ? Le taux de suicide parmi les victimes de harcèlement est de plus en plus élevé.

Un sujet de société au centre du roman de Philippe Besson paru ce jeudi 2 janvier 2025 et intitulé « Vous parler de mon fils ». On suit le narrateur, Vincent, durant une journée particulière. Un mois après le drame, il va participer, avec sa femme et son autre enfant, à une marche blanche en hommage à Hugo, son aîné. Hugo n’est plus là. La mort « c’est très concret. C’est une chaise vide dans le petit matin tranquille, malgré le soleil qui éclabousse. » Hugo a fait le choix de partir, d’abandonner face au désastre de sa vie.

Un adolescent un peu renfermé, timide, pas très costaud, intelligent et bon élève. Le portrait idéal pour devenir le souffre-douleur de quelques idiots congénitaux, avides de méchanceté, de ce plaisir coupable de faire du mal, de terroriser. Les parents, notamment la mère, se doutent que quelque chose ne tourne plus rond. Mais Vincent temporise, refuse de s’inquiéter, persuadé qu’au contraire cela permettra à Hugo de fortifier sa personnalité. De se durcir De devenir un homme…

Au contraire, le mal-être de l’adolescent va s’ancrer profondément avec les coups, les SMS, les insultes. Et ce ne sont pas ces dernières les moins graves. Vincent l’a compris, mais trop tard : « Une insulte n’est pas une abstraction, c’est très concret. L’avilissement n’est pas théorique, on le ressent dans sa chair, il lacère le corps, comme le ferait une lame de couteau. » Dans ce texte d’une intensité stupéfiante, les parents se souviennent comment ils ont tenté de sauver leur fils. Quand ils ont compris qu’il était harcelé, ils alertent le proviseur. Mais ils se heurtent à un mur, celui érigé en vertu de la consigne « Pas de vague ».

La marche blanche, c’est aussi pour dénoncer cet état de fait, cet abandon de certains. Le père oscille entre colère, résignation et volonté de protéger son fils survivant. Il raconte comment ils ont vécu les jours après le drame : « En fait, on n’a pas dormi, ou très peu, on est juste restés étendus dans le noir, et cette immobilité sans sommeil nous a semblé être la métaphore parfaite de notre existence, on était des gisants, plongés dans l’obscurité, on le serait jusqu’à notre dernier souffle. »

Cette fiction, terrible de réalité, risque de devenir des faits divers dans quelques semaines. Car le harcèlement, on ne le répétera jamais assez, est un fléau de plus en plus fréquent. Alors si vous, parents, avez le moindre doute, parlez à votre « Hugo » avant qu’il ne soit trop tard. Car après, il ne vous restera que des larmes pour la marche blanche.

« Vous parler de mon fils » de Philippe Besson, Julliard, 208 pages, 20 € (« Un soir d’été » de Philippe Besson vient de paraître en poche chez Pocket, 176 pages, 8 €)

dimanche 19 janvier 2025

Pamphlet - La France déconstruite dans « Les lettres qataries »

Gilles Martin-Chauffier endosse les habits d’un diplomate qatari pour résumer, d’un point de vue radicalement différent du parisianisme, une année politique française assez folle.


L’exercice littéraire n’est pas nouveau mais a fait ses preuves. Rien de tel que le regard d’un étranger pour mieux analyser sa propre société. Depuis les Lettres persannes, plusieurs intellectuels ont tenté de confronter la civilisation française à certaines de ses contradictions en utilisant un regard différent.

Gilles Martin-Chauffier, sans renouveler le genre, propose une réflexion d’actualité sur l’année politique française écoulée. Pour tenter de décrypter ces soubresauts, il se glisse dans la peau de Hassan, diplomate qatari en poste à Paris, racontant chaque mois à son frère resté au pays, ses découvertes de la France profonde ou des mœurs parisiano-parisiennes.

Quand il se déplace en province (Landes, Savoie), c’est assez bien vu. La France des terroirs n’a que peu changé et les défauts d’hier sont toujours aussi présents. Par contre, quand il s’agit de politique, on s’étonne que cet Hassan ait tant de critiques contre le président Macron ou François Hollande, et très peu contre Marine Le Pen. Il est sans pitié pour le dernier président socialiste : « qui ne restera dans l’Histoire que pour ses cinq ans de sieste à l’Élysée ». Il a tendance à oublier un peu vite que durant ce quinquennat, le terrorisme islamiste a violemment frappé et endeuillé le pays (Charlie, Bataclan, Nice) et que la réaction de la présidence a été à la hauteur. Que le président Hollande a été le premier à couper les ponts avec Poutine (alors que Sarkozy…) ou tout fait pour faire tomber Assad alors que d’autres députés allaient au contraire se pavaner à Damas.

Il est facile de déconstruire la vieille gloire de la France, reste que si elles avaient été moins partisanes, ces Lettres qataries auraient pu rester dans les mémoires. Raté.

« Les lettres qataries » de Gilles Martin-Chauffier, Albin Michel, 224 pages, 19,90 € (parution le 22 janvier)

samedi 18 janvier 2025

BD - La Marne en 1918, première véritable bataille de chars

Nouvel opus de la collection lancée par Glénat retraçant « Les grandes batailles de chars ». C’est à l’origine de ce type de combat que Brugeas et Bianchini (scénario et dessin) convient le lecteur amateur de faits militaires et de mécanique. Alors que les poilus meurent par milliers dans les tranchées, les gradés tentent de trouver des solutions pour enfoncer les lignes ennemies.

Les blindés (avec l’aviation), font leur première apparition. Lourds, fragiles, peu maniables, ils ne pèsent pas sur les combats. Jusqu’à l’apparition, début 1918, du char Renault FT. Un conducteur, un mitrailleur, une tourelle qui pivote à 360 degrés, des chenilles capables de franchir des tranchées : ces engins vont peser sur les ultimes attaques allemandes.

Les chars vont participer à la défense des positions des alliés, puis servir de pointe acérée pour lancer des contre-attaques payantes. Pour raconter le parcours de cette machine révolutionnaire, qui a inspiré tous les autres blindés, les auteurs se penchent sur le parcours d’un officier français, mécanicien, concepteur dans les usines Renault du FT et ensuite courageux combattant de la bataille de la Marne.

C’est très patriotique, un peu fleur bleue mais cela illustre parfaitement le fonctionnement de ces équipages, véritables cobayes et indirectement inventeurs de la guerre moderne.
« Les grandes batailles de char : la Marne », Glénat, 64 pages, 15,50 €

vendredi 17 janvier 2025

BD - Mutation liberticide pour "Les Salamandres"

Graham Gomez a une vie quelconque. Dans ce futur proche, il ne lui reste pourtant plus beaucoup d’opportunités pour profiter de l’existence. Ancien journaliste, un peu trop critique de la société, il a dû rendre sa carte de presse. Il s’est reconverti en boucher. Pas longtemps. La viande est devenue interdite.

Il rêve d’avoir en enfant avec son épouse. Encore faut-il qu’il décroche l’agrément nécessaire. Frustré, il ne peut même plus se soûler, l’alcool, comme la viande, étant prohibé de cette société surveillée de partout.

Alors il se déchaîne sur les derniers exclus : les salamandres. Des humains qui ont muté. Graham se moque d’eux en les traitant de crapauds. Ce qu’il ne sait pas encore, c’est qu’il va lui aussi se transformer. Cette fable futuriste, assez pessimiste, est écrite par Julien Frey. Au dessin, on retrouve Adrian Huelva déjà à la manœuvre sur la série U4. Une nouvelle version de la lutte d’un individu contre le totalitarisme de la société qui nous pend au bout du nez. Ce n’est pas spécialement optimiste, même si un embryon d’espoir subsiste.

De la SF intelligente qui fait fonctionner les méninges du lecteur ouvert et pas trop dupe.
« Les salamandres », Bamboo Drakoo, 120 pages, 19,90 € (parution le 8 janvier)

jeudi 16 janvier 2025

BD - Aurel signe un manifeste pour le dessin de presse


Il y a dix ans, les frères Kouachi, terroristes islamistes, ont assassiné une partie de la rédaction de Charlie Hebdo. Alors que de nombreuses voix s’élèvent pour la liberté d’expression à l’occasion de ce triste anniversaire, Aurel (Le Canard Enchaîné) signe un manifeste très personnel sur la situation de ces trublions que sont les dessinateurs de presse. Une profession en danger, paradoxalement. Car l’esprit Charlie n’a pas eu que du bon pour ces observateurs de la société, rarement tendres, empêcheurs de tourner en rond, poil à gratter de nos consciences.


Un album souple, de 32 pages percutantes, soulignant le paradoxe de ces dix ans : « Charlie quand ça leur chante ». Après un aperçu de la situation économique des journaux (fragile) et de la volonté des patrons de précariser les dessinateurs, Aurel s’attaque au fond du sujet. Il explique notamment comment les « néo-réacs », ces anciens gauchistes, souvent aux manettes des rédactions, grands manitous de l’opinion sur les plateaux télé, se sont autoproclamés gardiens de l’esprit Charlie.

Il leur oppose le nouveau public, plus jeune, plus critique, refusant les clichés et second degré trop facile et de plus en plus daté. Ceux que les néo-réacs mettent, en vrac, dans le mouvement « woke ». Aurel, à titre personnel, explique qu’il entend continuer à vouloir faire rire et réfléchir avec ses dessins. Tout en en prenant compte des remarques de la nouvelle génération, s’éloignant de ceux qui n’aiment Charlie que quand il faut dézinguer l’Islam ou les féministes.

Et de conclure en espérant pouvoir continuer à faire son travail, comme il l’entend, en s’améliorant, refusant toute leçon de ce ceux qui sont « Charlie quand ça leur chante ».
« Charlie quand ça leur chante », Futuropolis, 32 pages, 6,90 € (parution le 8 janvier)

mercredi 15 janvier 2025

Cinéma - « Quiet life », famille traumatisée et résignée

Syndrome de résignation. Le film d’Alexandros Avranas, sans être médical, apprend aux spectateurs que cette maladie, récemment détectée, notamment dans les pays nordiques, fait des ravages chez les jeunes. 

Pour comprendre comment on l’attrape, il raconte la vie de cette famille russe, réfugiée depuis peu en Suède. Le père, ancien proviseur, a trop milité ouvertement pour les droits de l’Homme. Harcelé par la police, il a failli mourir quand il a été agressé dans la rue. Un coup de couteau dans le ventre.

Une fois remis sur pied, face à de nouvelles menaces, il décide de rejoindre clandestinement la Suède avec sa famille et demande l’asile politique. Un long parcours compliqué. Il est hébergé par l’État, mais surveillé. Ses filles sont scolarisées, sa femme, enseignante, se morfond sans avoir le droit de travailler. Quand la demande d’asile est refusée par manque de témoignages, il se décide à solliciter sa plus jeune fille pour raconter l’agression. Car elle était présente. Mais l’angoisse, le stress, déclenche ce syndrome de résignation. Elle tombe dans un profond coma.

Le film va raconter deux combats en parallèle. Les parents vont tout faire pour sauver leur petite fille, mais aussi tenter le tout pour le tout pour ne pas retourner en Russie. En montrant une famille modèle, dans un pays civilisé, le réalisateur propose en réalité un horrible cauchemar ou l’administration écrase tout poussant d’honnêtes gens à mentir pour sauver leur vie.

Un film glaçant, porté par des interprètes en état de grâce, notamment les deux fillettes incroyablement crédibles dans ces rôles de déracinées doublement traumatisées.

Film d’Alexandros Avranas avec Chulpan Khamatova, Grigoriy Dobrygin, Naomi Lamp