mardi 6 décembre 2016

De choses et d'autres : 2016, hécatombe politique

L’année 2016 restera certainement dans les annales comme celle qui compte le plus de « morts politiques ». A l’étranger comme en France.
Quand François Hollande annonce son renoncement à se représenter à la présidence de la République, il ne fait que suivre le mouvement. Tout a commencé quand David Cameron a donné sa démission de Premier ministre après la victoire du Brexit. Persuadé de l’emporter, il avait mis son poste en balance. Perdu. De la même façon, Matteo Renzi, en voulant réformer son pays, s’est heurté à un mur infranchissable. Obligé de rentrer dans le rang.
Hillary Clinton, donnée victorieuse par les sondages, a finalement perdu (malgré une large avance en voix) face au populiste Trump. Carrière terminée, elle peut se transformer en gentille grand-mère très disponible. Nicolas Sarkozy, persuadé que son histoire d’amour avec la France pouvait recommencer, devra se contenter de Carla. Le rejet est total, irrémédiable. Juppé aussi a été victime des sondages. La victoire qui lui était promise, est finalement revenue à l’étonnant François Fillon, le seul qui pour l’instant doit apprécier 2016.
Le prochain sur la liste pourrait bien être Manuel Valls. En démissionnant de Matignon pour endosser le simple costume de candidat à la primaire de la gauche, il prend le risque de se retrouver totalement démuni en janvier et d’être la première victime… de 2017. 

lundi 5 décembre 2016

BD : La force des premiers Américains, de véritables "Rebels"


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La victoire de Trump à la présidentielle US est un signe du patriotisme fort de bon nombre d’Américains. Rebels, série écrite par Brian Wood et dessinée (entre autres) par Andrea Mutti, raconte comment de simples colons, paysans et chasseurs, ont décidé de se dresser face aux exigences de l’empire britannique. On suit ici Seth Abott, forestier membre des Green Mountain Boys, qui va harceler les tuniques rouges du roi Georges jusqu’à leur départ. Un gros récit de plus de 270 pages décrivant avec réalisme l’existence de ces hommes et femmes qui ont souvent payé de leur vie une certaine idée de la liberté.
➤ « Rebels », Urban Comics, 22,50 € 

dimanche 4 décembre 2016

BD : Batailles en musique


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Il est des dessinateurs qui ne font pas trop de bruit malgré un talent qui leur permettrait de clouer le bec à 95% des illustrateurs de la place. Florent Maudoux, efficace et rapide, a de plus développé son propre monde et n’en dévie pas. «Freaks’ Squeele» ne lui suffisant plus, il s’est lancé, toujours pour le Label 619, dans le récit de l’enfance de Funérailles. On retrouve dans ce troisième tome le jeune médecin occupé à creuser des tranchées pour y ensevelir tous les soldats morts. Il finira par rejoindre Pretorius, son frère, le futur grand guerrier. Son arme : un violon. Il affrontera les meilleurs tueurs de Psamathée de la Mantis et sa légende débutera. Très guerrier, ce cycle achevé, Florent Maudoux promet à ses lecteurs une suite shojo, soit plus spécialement destinée au public féminin.
➤ «Freaks’ Squeele Funérailles» (tome 3), Ankama, 14,90 €


Littérature : Histoire à ne pas jeter aux orties

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Un roman sur la puissance des mots. « Alice et les orties » de Julie Bonnie porte sur ces histoires qui nous permettent d’aller mieux. La narratrice, Alice, mariée, mère de deux enfants, décide de raconter une histoire pour ensuite la brûler. La mise en pratique d’une vieille légende. Seule dans sa maison, volets fermés, elle cherche les mots. Un exercice délicat « Je n’ai pas écrit une ligne. Ce ne sera pas si facile de se débarrasser de l’histoire, finalement. (…) Je ne comprends pas. La seule phrase qui m’obsède »
Entre conte féerique et introspection, ce court roman est richement illustré des dessins de Robin Feix, par ailleurs bassiste du groupe Louise Attaque.  
➤ « Alice et les orties », Julie Bonnie, Grasset, 14,90 €

samedi 3 décembre 2016

BD : Enfants seuls dans les limbes


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Série phénomène de ces dix dernières années, « Seuls » garde en haleine ses lecteurs grâce à une déferlante de péripéties. L’idée de départ de Fabien Vehlmann, le scénariste, est de placer cinq enfants seuls dans une ville déserte. Succès aidant, il a creusé l’idée, trouvé des explications et multiplié les situations désespérées. Deux cycles plus tard, «La machine à démourir», 10e titre de la série, lance un nouvel arc narratif. On retrouve tous les héros dans les limbes car morts presque au même moment. Séparés, ils ont des parcours très différents. On suit plus particulièrement Kelly, le plus jeune et naïf. Accompagné du Maître des couteaux, il trouve refuge dans un salon du jouet. Un vrai bonheur pour lui, mais rapidement il se retrouve avec une nouvelle ennemie et risque de perdre son dernier ami. Gazzotti au dessin fait toujours des miracles, entre horreur et pays des joujoux. Les fans pourront retrouver leurs héros, en chair et en os, le 8 février prochain, pour l’adaptation cinématographique de cet univers unique.
➤ « Seuls » (tome 10), Dupuis, 10,60 €


De choses et d'autres : les cartes insolites de la France bizarre

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Si vous conservez une âme d’enfant fasciné par le vaste monde, ce petit « Atlas de la France incroyable » (Le Livre de Poche) est pour vous. Olivier Marchon a collecté des centaines de données et les a retranscrites sous forme de graphiques. Au total, il propose « 50 cartes tordantes et véridiques » à votre curiosité. Une partie historique nous apprend entre autre qu’à la Révolution, nombre de communes ont changé de nom. La ville de Bordeaux par exemple s’est appelée durant quelques années « Commune Franklin », Bayonne récupérant le nom de « Jean-Jacques Rousseau ». Marseille, pour des révolutionnaires en manque d’imagination, a été rebaptisée « Ville-sans-Nom ». Vous saurez où il faut claquer deux, trois ou quatre bises, si l’on dit pain au chocolat ou chocolatine voire comment nommer une serpillière (gueille en Aquitaine, torchon en Belgique). Sans surprise, le département de l’Hérault (merci le Cap d’Agde) compte le plus de lieux voués à l’échangisme. Enfin, si vous recherchez des visites hors des sentiers battus, la région est fort bien lotie avec les musées du préservatif (dans le Gers, à... Condom), du corbillard (Tarn-et-Garonne) et de la torture (Carcassonne). 


vendredi 2 décembre 2016

DVD : Aux racines de l’antisémitisme avec "Ils sont partout" d'Yvan Attal

Paranoïaque Yvan Attal ? Pas plus que tous les Juifs selon lui. Il l’explique à son psychanalyste (Tobie Nathan) dans les séquences lien rouge entre les différents sketches censés se pencher sur les grands préjugés sur les Juifs. C’est la partie la plus sérieuse, comme un documentaire, où il met beaucoup de lui, non sans un humour quand il explique que c’est sa femme qui est obsédée par les Juifs, plus que lui par l’antisémitisme mais qui pourtant ne parle que de ça à son thérapeute.

Le premier sketch porte sur la légende selon laquelle les Juifs sont partout. Il y a comme des airs de ressemblance avec la réalité quand on découvre la présidente d’un parti d’extrême-droite (Valérie Bonneton) danser avec un ancien SS dans un bal à Vienne en Autriche. Problème récurrent des films à sketches, certains sont moins forts que d’autres.


Passons donc sur la thématique « Les Juifs sont riches », un peu trop caricatural pour savourer le dialogue d’anthologie entre deux talmudistes (Gégory Gadebois et Denis Podalydès) sur une question toute simple portant sur deux ramoneurs, l’un propre, l’autre sale. Brillant, comme l’humour juif (qui reste le meilleur du monde, n’en dé- plaise à certains) et la force de la réflexion quand on doute. Et puis dans ce film, forcé- ment pessimiste (les derniers événements sont malheureusement là pour confirmer cette vision de l’avenir), il y a une perle. En se demandant si les Juifs n’en font pas trop avec le Shoah, Yvan Attal et Emilie Frèche, la co-scénariste, offrent un rôle en or à Poppeck. Au final, le film est d’une grande sagesse, disant les choses simplement, démontant par l’humour ou l’absurde ces clichés ridicules. Mais au combien destructeurs depuis des siècles...
Dans les bonus du DVD, deux scènes coupées. Plus exactement deux scènes en entier. Yvan Attal explique en préambule avoir préféré les édulcorer, notamment en France, tant le sujet est encore sensible. 
➤ « Ils sont partout », Wild Side Vidéo, 14,99 € le DVD

De choses et d'autres : La vie derrière la mort

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J’avoue, je me suis fait prendre. Me baladant sur le site Allociné pour me renseigner sur les sorties, je repère un film prometteur. Son titre, « Déjà-vu 2 », laisse entendre qu’on a affaire à une suite. La photo mise en avant montre la course folle dans les bois d’une jeune fille terrorisée, deux couteaux plantés dans le torse, un hachoir enfoncé dans l’épaule. Du gore second degré comme j’aime.
La fiche technique précise qu’il s’agit d’une production australienne de la société Don Dorgan avec en vedette les jeunes et pulpeuses Azalée Vidance et Estelle Effoné. Le pitch est basique, voire simplet. Je ne résiste pas à la tentation et lance la bande-annonce. Pas de surprise sur les scènes.
Sauf que le commentaire off du personnage principal féminin déstabilise. « Vous savez tous que je vais mourir. Pourquoi ? Parce que dans ce genre de film, lorsqu’on a le malheur d’être une fille qui n’a pas froid aux yeux, on meurt. » La suite le prouve : elle se fait massacrer par le méchant, toujours avec ce commentaire clinique « Pas un moment vous n’aurez peur et ma mort sera totalement inutile. » Il faut attendre 2’ 15” d’images sanglantes avant de comprendre. Le générique défile et la jeune fille continue ses explications « sauf que comme vous je suis donneuse d’organes présumée et que je sauverai peut-être la vie de quelqu’un ».
Le don d’organes (Don Dorgan...) vient de signer la meilleure pub déguisée de l’année. 

jeudi 1 décembre 2016

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Une mère de famille a quelques heures pour rassembler une grosse somme qui lui permettra de sortir de prison. La corruption aux Philippines, sans le moindre filtre.
   
   
    Ma' Rosa
   



Film engagé, violent et sans concession, « Ma’ Rosa » de Brillante Mendoza dresse le portrait des Philippines actuelles. On comprend mieux dès lors pourquoi un populiste comme Duterte a été élu à la surprise générale uniquement en promettant d’éradiquer corruption et trafic de drogue. La vie est dure pour Ma’ Rosa (Jaclyn Jose, prix d’interprétation féminine à Cannes), épicière dans un quartier populaire. Son labeur permet de faire vivre toute sa petite famille, son mari et ses quatre enfants. Mais vendre des soupes en sachet, des bonbons et quelques cigarettes ne suffit pas. Bien malgré elle, elle est devenue revendeuse de drogue. De petites quantités de cristal fournies par un plus gros trafiquant.
Tout bascule quand, sur dénonciation, la police débarque dans son échoppe et l’arrête avec son mari. Les policiers, en civil, saisissent la drogue, l’argent liquide et menacent le couple s’il ne donne pas son fournisseur. La mère, qui a laissé les enfants seuls à la maison s’inquiète et accepte le marché.
■ La solidarité à la rescousse
Mais les policiers, qui semblent agir en dehors de tout contrôle de leur hiérarchie, veulent plus. Un gros pot-de-vin et tout rentrera dans l’ordre. Ce bref résumé du début du film semble un portrait à charge d’un pays en totale déliquescence. Les pauvres, de plus en plus pauvres, oublient en se défonçant. Les commerçants ne s’en sortent qu’en participant au trafic. Quant à la police, elle s’engraisse odieusement sur cet état de fait, préférant rançonner les dealers que de les emprisonner et les juger. Pas sûr que l’office du tourisme des Philippines apprécie.
Heureusement il y a beaucoup plus dans ce film à ne pas prendre au premier degré. Car derrière cette noirceur, il existe des solidarités réelles. Les enfants vont tout faire pour récolter la somme demandée. Solliciter les parents éloignés, payer de leur personne, vendre leurs biens les plus précieux. Cette course contre la montre donne un rythme et une force indéniables au film. Il paraît que les Philippines changent. Espérons que ce formidable esprit d’entraide et de solidarité n’en pâtisse pas trop. 

De choses et d'autres : Vie et mort(s) de Fidel Castro

castro,mort,cia,lsd,barbeFidel Castro, à 90 ans, est mort de vieillesse. Une fin improbable pour ce chef d’État controversé qui a échappé, selon diverses sources, à 636 tentatives d’assassinat. La CIA a longtemps tenté d’éliminer ce leader de la Révolution mondiale. La déclassification de documents dans les années 2000 a révélé qu’avant de choisir la solution finale, les Américains ont tenté la manière douce. Le but était de discréditer le « leader maximo ».
En pleine période de recrudescence des drogues hallucinogènes, le LSD notamment, des espions ont eu l’idée de piéger le studio d’où le chef castriste prononçait ses discours. Le plan était de diffuser un gaz en pleine intervention. On imagine la suite, forcément très préjudiciable pour un Castro qui n’a jamais été adepte de la frivolité et peu expansif sur ses états d’âme. Autre idée, toujours dans le symbole, badigeonner ses chaussures d’une crème dépilatoire. Car pour les espions US, Fidel Castro sans sa barbe et une bonne part du mythe s’évanouit.
Par la suite, la CIA est passée aux méthodes plus expéditives. Empoisonner les cigares, enduire l’intérieur de sa combinaison de plongée d’un puissant poison, voire bourrer d’explosifs des coquillages dans la zone où il se baignait. En vain… A l’arrivée, le guérillero s’est éteint dans son lit, après des décennies de pouvoir sans partage. La vieillesse se révélant au final, la plus fidèle alliée du capitalisme.