Virginie Despentes aime provoquer. Cet essai sur la condition des femmes intitulé "King Kong théorie "devrait une nouvelle fois faire bondir... les hommes.
Elle ne fait pas dans la dentelle et n'y met pas les formes. Quand Virginie Despentes se penche sur la condition des femmes, cela décoiffe. Connue pour ses romans et films qui ont fait scandale au moment de leur sortie (« Baise-moi » essentiellement), elle précise dans une introduction nerveuse quelle écrit ces lignes pour « les moches, les vieilles, les camionneuses, les frigides (...) toutes les exclues de la bonne meuf » et d'expliquer quelques pages plus loin que « quand on n'a pas ce qu'il faut pour se la péter, on est souvent plus créatifs. Je suis plutôt King Kong que Kate Moss, comme fille. Je suis ce genre de femme qu'on n'épouse pas, avec qui on ne fait pas d'enfants (...)».
Pour parler des femmes, Virginie Despentes se prend tout simplement en exemple. Il se trouve que sur les divers chapitres qu'elle aborde, elle en connaît un bon bout. Que cela soit le viol, la prostitution ou l'industrie du film porno, elle s'appuie sur des expériences personnelles. Un vécu qu'elle transforme en avis. Elle mélange allègrement réflexion assez poussée et argumentée avec la description de faits et gestes tirés de son histoire.
Quelques vérités sur le viol
Le viol par exemple, elle décrit le contexte, comment elle l'a senti venir, et n'a rien fait pour l'éviter. Comme tétanisée. Est-ce que cela lui donne une légitimité pour ensuite en tirer des généralités ? Certains en doutent, et pourtant comment ne pas donner plus de crédibilité à une Virginie Despentes et son parcours heurté mais imprégné du réel qu'à une féministe, universitaire, à 100 lieues de ce monde machiste peuplé de violeurs en puissance ? « On s'obstine à faire comme si le viol était extraordinaire et périphérique, écrit-elle, en dehors de la sexualité, évitable. Comme s'il ne concernait que peu de gens, agresseurs et victimes, comme s'il constituait une situation exceptionnelle, qui ne dise rien du reste. Alors qu'il est, au contraire, au centre, au cœur, socle de nos sexualités. Rituel sacrificiel central, il est omniprésent dans les arts, une constante à travers les siècles ». Première divergence évidente avec la parole officielle du politiquement correct.
De l'importance de la prostitution
Elle poursuit son entreprise de démystification en présentant la prostitution sous un jour nouveau. Elle estime que les tentatives d'interdire la prostitution ne sont que les conséquences d'hommes redoutant que des femmes ne deviennent autonomes et indépendantes sur le plan économique économique. Elle prend de la même façon la défense du cinéma X : « Le porno, volontiers dénoncé comme mettant les gens mal à l'aise par rapport au sexe, est en réalité un anxiolytique ». Une théorie un peu plus difficile à avaler tant les intérêts financiers en jeu sont importants dans ce qui reste une usine à fric. Au final elle explique cette fameuse théorie autour de King Kong en décortiquant le film de Peter Jackson. Virginie Despentes, presque la quarantaine, en quittant la fiction, prend des risques encore plus grands. Elle sait pourtant où elle va : « Heureusement, il y a Courtney Love. En particulier. Et le punk-rock en général. Une tendance à aimer le conflit. Je me refais une santé mentale, dans mon ombre de blonde. Le monstre en moi ne lâche pas l'affaire».
« King Kong théorie », Virginie Despentes, Grasset, 13,90 €
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