dimanche 8 septembre 2013

BD : énigmatique maladie d'amour de Cyril Bonin

Amorostasia, cyril Bonin, futuropolis
« Tomber amoureux nuit gravement à la santé » proclame un bandeau cerné de noir en bas de la couverture de cette bande dessinée signée Cyril Bonin. Comme fumer, mais en pire. Une épidémie frappe la France. Les personnes victimes d'une forte émotion liée à l'amour sont littéralement pétrifiée sur place. Transformée en statue, un sourire aux lèvres en lisant une lettre d'amour, regardant la photo de l'être aimé... Parfois les victimes sont deux. Généralement en plein baiser fougueux. Les médecins, impuissants, ne proposent qu'une solution : limiter les effusions. Un roman graphique sur l'amour, aux airs de cauchemar, les jolies femmes sont suspectées d'être des séductrices et doivent arborer un brassard aussi infamant que l'étoile jaune. Heureusement la fin est heureuse. Comme ces romans à l'eau de rose interdits après l'épidémie d'amorostasie.

« Amorostasia », Futuropolis, 19 €

samedi 7 septembre 2013

ÇA BRUISSE SUR LE NET : Mort augmentée

mort, petite, davy, mourier, delcourt, augmentée
Artiste multimédia prend tout son sens dans le cas de Davy Mourier. Ce chauve audacieux (l'un ne va pas forcément avec l'autre mais je n'ai rien trouvé de mieux pour décrire le personnage...) a déjà tâté de toutes les formes d'expressions, de la bande dessinée (sa passion première) à la série télé ou au one man show. Mercredi est sortie en librairie sa dernière création, « La petite mort », album de BD paru chez Delcourt racontant l'apprentissage du fils de La Mort au fauchage d'âmes.
Du papier, de l'encre... Trop simple pour Davy. Il a déjà engendré un album accompagné d'un CD où il commentait l'action. Cette fois il profite de la réalité augmentée via une application sur smartphone. Une fois que vous avez acheté l'album (14,95 euros, étape incontournable) munissez-vous de votre téléphone, scannez le QR code en début d'album, téléchargez l'application (gratuite elle, faut pas pousser !) et découvrez la dizaine de bonus placés au gré des pages.
Du personnage de la Petite Mort en 3 D, à un faux site internet en passant par des vidéos où l'auteur explique son cheminement créatif, l'ensemble est conçu avec humour, comme toujours chez Davy Mourier. Cerise sur le gâteau, un jeu vidéo, malheureusement réservé aux possesseurs d'Iphone. Je vous laisse, j'ai de quoi m'occuper ce week-end.


BD : Le jeu des super-héros dans "Geek Agency"

Geek Agency, briones, huet, ankama
Lancée comme une série BD réaliste avec groupe de jeunes gamers branchés lancés dans un jeu de rôle un peu ringard, « Geek Agency », dès le second tome, prend le virage net du comics de super-héros dans un monde résolument futuriste. Tim et Adam, les deux seuls rescapés du tome 1, se retrouvent sur la planète Duragon. Ils affrontent Kraal, lézard humanoïde vert et géant, ancien seigneur Saï, de nouveau libre et bien décidé à se venger. Tim croise également la route de sa petite sœur, morte il y a bien longtemps. Rêve, cauchemar ou manipulation de l'esprit ? Cette énigme restera sans réponse dans un premier temps, les auteurs, Briones et Huet, se consacrant essentiellement à expliquer comment est née la Geek Agency et d'où viennent les seigneurs Saï. Très inspirée des comics américains, la série offre une multitude de bestioles aux pouvoirs divers et variés, des combats d'anthologie et une intrigue à plusieurs niveau avec en arrière-plan un complot de l'ombre. Beaucoup d'influences évidentes parfaitement « digérées ».

« Geek Agency » (tome 2), Ankama, 14,90 €

vendredi 6 septembre 2013

BD : Nos amis les monstres


masbou, leprevost, cryptozoologie, delcourt
Explorateurs, aventuriers, découvreurs : ils font rêver depuis des siècles. De Christophe Colomb aux astronautes, ils sont partis à la conquête de nouvelles frontières. Il ne reste plus grand chose à explorer sur notre bonne vieille terre. Mais il reste toujours les doux rêveurs, ceux qui croient à l'impossible. Dans cette catégorie, les cryptozoologues ont connu leur heure de gloire à la fin du 19e siècle. Masbou au scénario et Leprévost au dessin nous entraînent dans le sillage des membres du Monster Club. De la création de cette société secrète d'érudits à la première expédition, ce sont 54 pages pleines de bagarres, de coups fourrés, de trahisons, de peuplades inconnues et d'animaux improbables. Deux Monsters Clubs ont vu le jour au même moment. L'un à Londres, l'autre aux USA. La première partie de l'album se concentre sur la compétition impitoyable entre ces deux groupes. Mais ils devront finalement s'allier pour faire face à un danger encore plus grand.
La série réalise l'exploit de faire vivre une dizaine de personnages tous aussi attachants les uns que les autres. Une ribambelle de fortes têtes aux intérêts divergents. Une réussite, d'autant que le « méchant », Chacal balafré, tire lui aussi son épingle du jeu...

« Monster Club » (tome 1), Delcourt, 14,30 €

jeudi 5 septembre 2013

ÇA BRUISSE SUR LE NET : Qui cherche trouve

Les archéologues fouillent les ruines pour tenter de découvrir les occupations de nos ancêtres. De nos jours, il est plus simple d’analyser les statistiques Google pour obtenir un instantané des occupations de nos contemporains. À prendre avec des pincettes cependant. En France, les chiffres de cet été (juillet et août) placent dans le trio de tête trois occurrences : “résultat bac”, “ramadan 2013” et “royal baby”. Un chercheur, dans quelques siècles, en déduira peut-être que la majorité de la population française était musulmane, niveau bac et passionnée par la royauté (ou les bébés...).
Autre indication fournie par le moteur de recherche, les questions formulées directement. En tête cet été “comment bien bronzer ?” suivi de “comment bronzer rapidement ?” Comment en est-on arrivé là surtout ! Bronzer n’est quand même pas compliqué. Il suffit de se mettre au soleil. Point. Tous les autres trucs et astuces répertoriés sur les blogs et sites de beauté ou de santé ne sont que fariboles.
Google met en évidence une certaine population, accro au clavier. Sûrement pas le vraui pays. Espérons-le car au rayon des recherches de lectures, les académiciens ont du souci à se faire. Première position pour le recueil de phrases cultes de Nabilla, suivi comme son ombre par le roman de Laetitia Millot. Comment, vous ne connaissez pas cette romancière pleine de talent ? Normal, avant de s’attaquer à l’Académie elle va conquérir Hollywood après son rôle dans... “Plus belle la vie”.

BD : Les Copines sympas de Cazenove et Fenech

cop's, copines, cazenove, fenech, bamboo
Scénariste vedette des éditions Bamboo, Christophe Cazenove ne se contente pas de ses séries stars, des Sisters aux Pompiers. Il déborde de projets et pour « Mes cop's », il a décidé de choisir le dessinateur par concours. 150 courageux ont accepté de dessiner l'un des cinq gags tests mettant en scène Jessica et ses multiples amies. Huit finalistes sont sortis du lot et c'est finalement Philippe Fenech, le Montpelliérain, qui a remporté la mise. Le dessinateur de Ulysse quitte la mythologie pour entrer de plain-pied dans notre quotidien fait de mode, potins et de nouvelles technologies. Enfin, le quotidien de jeunes filles de 16 à 18 ans, le cœur de cible d'une BD qui ne prend pas ses lectrices pour des quiches. Ces 40 premiers gags sont autant de portrait de nanas aux personnalités fortes et remarquables, de l'intello à la gothique en passant par la timide ou l'énervée. Une radiographie de la jeunesse à couettes (même si elles n'en portent plus) des années 2000. Cazenove utilise tous les travers de ces ravissantes idiotes pour se moquer d'elles. Même si souvent, ce sont les garçons, pauvres soupirants aux techniques de drague désuètes, qui sont les dindons de la farce.

« Mes cop's », Bamboo, 10,60 €

mercredi 4 septembre 2013

Livre : "Moment d'un couple", roman de Nelly Alard sur un triangle tragique

Un homme, deux femmes. Nelly Alard s'attaque au classique triangle amoureux. Son plus : des personnages trop intelligents pour être victimes de leurs pulsions. A moins que...

nelly alard, moment d'un couple, gallimard, rentrée littéraireJuliette, mère épanouie de deux adorables enfants, femme tout aussi rayonnante d'un homme moderne, journaliste dans un grand hebdomadaire parisien a tout pour être heureuse. Surtout si l'on rajoute au tableau idyllique des amies et un boulot prenant. Une vie parfaite jusqu'à ce soir fatidique. Elle doit aller au cinéma en tête à tête avec son mari, Olivier. Il lui téléphone au dernier moment pour annuler. Avec un argument hallucinant : « J'ai une histoire avec une fille. Une élue socialiste. » Il est obligé de l'avouer au téléphone car quand il dit à sa maîtresse, Victoire, qu'il doit rejoindre sa femme pour aller au cinéma, elle a une crise d'épilepsie. Il se retrouve dans l'obligation de la conduire à l'hôpital. Juliette apprend donc la tromperie de son mari dans des conditions peu banales. La suite de leur histoire est tout aussi hors norme.
Nelly Alard, également comédienne et journaliste, dresse le portrait de toute une génération dorée, trop longtemps persuadée d'être à l'abri de la passion. Car Juliette, après un premier moment de rejet, décide de se battre pour conserver l'amour du père de ses enfants.

La lutte de deux « femelles »
Lui, journaliste politique, séduit en pleine interview par cette jeune élue plein d'avenir, regrette son infidélité. Mais il est trop tard et surtout Victoire, sous des airs de femme politique sûre d'elle, aux idées progressistes et modernes, est une véritable folle, menaçant de se suicider en public si Olivier ne quitte pas Juliette. Alors, dans ce milieu érigeant la non-violence, le commerce équitable, la tolérance et le bio en autant de chapelles, Juliette va se transformer en femelle prête à tout pour conserver son mâle. « C'est la lutte de deux femelles, une curée, un carnage (…) des femelles avant tout et quand elles ont des petits c'est pire, quand elles ont des petits, c'est là qu'elles deviennent dangereuses, c'est là qu'elles ont la rage, c'est là qu'elles peuvent tuer. » Victoire n'abdiquera pas. Au contraire, elle va harceler Olivier, puis Juliette, comme pour prendre une revanche sur cet amour renaissant.
L'amour, il en est beaucoup question dans ce roman à l'écriture nerveuse et hachée, comme scandée aux moments dramatiques. A l'image de cette belle réflexion de Juliette sur la date de péremption d'un « Je t'aime ». « On ne peut pas dire je t'aime puis cinq minutes après je ne t'aime pas, mais quinze ans plus tard oui, quelle est la durée de vie implicite du mot je t'aime ? » S'il est parfois un peu trop « Parisien » (voire carrément bobo critiqueront les plus acerbes), ce roman aborde malgré tout un thème immortel. Quels que soient le milieu ou l'époque, la passion fusionnelle dans un couple ne dure qu'un temps. C'est cet après qui est le plus compliqué à admettre et à gérer. Juliette en est l'exemple parfait.
Michel LITOUT
« Moment d'un couple », Nelly Alard, Gallimard, 20 €



mardi 3 septembre 2013

ÇA BRUISSE SUR LE NET : @robase moyenâgeux

aro.jpg
Moderne internet ? Pas tant que ça. J'apprends avec consternation que le signe « @ » symbole de la communication et du partage sur le net a été inventé par les moines copistes. Vos adresses email, vos pseudos sur Twitter ? Juste le recyclage d'une trouvaille des scribes du XIVe siècle à la recherche d'un peu d'efficacité. « Utilisé comme un équivalent du « a » italien (qui correspond à la préposition « à » en français), l’arobase et son tracé bref, effectué d’un coup, leur aurait permis de gagner en vitesse et, donc, de travailler plus vite ».
Un temps, j'ai cru à une blague du Gorafi, le site qui distille de fausses informations iconoclastes. Sauf que l'article de l'arobase moyenâgeux vient du journal La Croix, titre de référence dans le milieu des moines copistes (même s'ils ne sont plus très nombreux depuis l'invention de Gutemberg et de l'imprimante multi-fonctions). Appelé aussi « a commercial » l'arobase a connu une seconde vie en raison de sa disponibilité. Un peu perdu dans le clavier des PC, il est facile à trouver sur les Mac (actuellement, en haut à gauche). Les développeurs ont donc mis l'@ à toutes les sauces. La touche est devenue une des plus utilisées puisque qu'elle permet également de composer le symbole # popularisé avec les hashtags.
On peut aussi lire l'histoire à l'envers, façon uchronie à la Philippe K. Dick. L'@ est évident sur les claviers Mac car Steve Jobs, avant Apple, a inventé la machine à voyager dans le temps. Il a vu l'importance de l'@ dans le futur, l'a intégré à ses ordinateurs pour devenir l'homme le plus riche du monde, avant de souffler l'idée à un moine copiste. Mais ça, j'ai du le lire sur le Gorafi...

lundi 2 septembre 2013

ÇA BRUISSE SUR LE NET : Boris, slip, espèces


boris boillon, tunisie, euros, fraude, sarkozy
Pour la reprise de cette chronique quotidienne sur les dérapages et autres errements du monde virtuel, je me devais de frapper fort. L'actualité dans sa grande mansuétude m'offre un sujet en or, de ceux qui nous font penser qu'un « bon client » le reste à vie. Boris Boillon sera donc la première victime de cette nouvelle saison encore plus impitoyable que les précédentes (roulements de tambour !).
Boris, fringant arabophone au charme incontestable, tape dans l'œil de Nicolas Sarkozy. Conseiller diplomatique du ministre de l'Intérieur, il est propulsé fort logiquement ambassadeur après 2007 (souvenez-vous, Sarko président). Irak, Tunisie. Premier coup d'éclat, monsieur l'ambassadeur pose en slip de bain, pectoraux et biscoteaux luisants, sur le réseau social Copains d'Avant. La toile rit. Les Tunisiens, eux, le prennent en grippe. Première conférence de presse du représentant du pays des Droits de l'Homme dans le pays fraîchement libéré de Ben Ali. Boris rétorque sèchement aux journalistes locaux : « Je ne répond pas aux questions débiles. » Et question débilité, Boris se pose un peu là, lui qui est allé défendre Kadhafi sur les plateaux de télévision français. Bref, Boris quitte son poste d'ambassadeur en 2012 (souvenez-vous, Hollande président) pour se reconvertir dans les affaires. Dans ce cadre, le susnommé Boillon est pris par la patrouille, fin juillet à Paris dans le train de Bruxelles, 350 000 euros en liquide dans ses valises. Somme colossale, non déclarée évidemment... Un bon client je vous dis.

dimanche 1 septembre 2013

Livre : Dans un avion pour Caracas avec Charles Dantzig

caracas, dantzig, livre de pocheRoman gigogne, « Dans un avion pour Caracas » se permet d'emprunter nombre de chemins détournés. Des solos d'écriture pour mieux amener un aspect de la personnalité du héros Xabi Puig, voire de l'auteur. Charles Dantzig est coutumier du fait. Il aime piocher dans des faits insignifiants les bases d'une théorie implacable sur la beauté, l'amitié, la folie ou autre sujet universel. Réflexion sur l'amitié, l'amour et l'engagement, ce roman de Charles Dantzig a la puissance des grandes œuvres, celles qui, tout en étant ancrées dans le temps présent, peuvent survivre aux modes. (Le Livre de Poche, 6,90 €)
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