jeudi 3 mai 2012

Roman - Rallumez les Lumières, message du "Cerveau de Voltaire" de Franck Nouchi

Un illuminé, regrettant l'époque des Lumières, dérobe le cerveau de Voltaire pour tenter de cloner et ressusciter le célèbre penseur.


Roman foisonnant d'idées et de références, « Le cerveau de Voltaire » de Franck Nouchi est aussi une charge sans concession contre les penseurs d'aujourd'hui. Alors que Voltaire, en son temps, était l'intellectuel le plus connu et respecté d'Europe, que son avis était régulièrement pris par tous les « Grands » du monde, aujourd'hui les rares intellectuels font figure d'imposteurs médiatiques. C'est du moins le message développé en filigrane dans ces 200 pages, premier ouvrage de fiction de ce journaliste du Monde, tournant parfois au pamphlet.

Dans un avant-propos très didactique, le lecteur apprend que Voltaire « meurt le 30 mai 1778 dans d'horribles souffrances ». L'autopsie révèle que « le cœur était très petit, le cerveau très gros ». Les deux organes ont été conservés. Le cœur dans le salon d'honneur de la Bibliothèque nationale, le cerveau, après moultes péripéties, à la Comédie Française.

Intellectuels étrillés

De nos jours, en prévision d'une exposition hommage à Voltaire, le Professeur Grunberg, chef du laboratoire du musée de l'Assistance publique, charge la jeune scientifique Clélia Cohen de décrypter le génome du grand intellectuel. Des recherches qui donnent l'idée à un illuminé de cloner Voltaire. Dans ce but, il dérobe le cerveau de Voltaire. Le roman devient alors policier, avec l'entrée en scène du commissaire Marcel Attias. Avec la ravissante Clélia, c'est le personnage clé du roman. Ce flic un peu bourru, juif pied-noir, est une légende du Quai d'Orsay. Il a gardé un petit accent chantant. Mais « c'est un dur à cuire, l'un de ces flics incapables de lâcher une affaire tant qu'il ne l'avait pas résolue. » Attias, en plus de l'enquête de terrain, va se pencher sur l'œuvre de Voltaire et c'est à travers ses yeux que l'on redécouvre le parcours du maître des Lumières.

Et puis une revendication arrive. Une lettre anonyme qui annone que « dans une vingtaine de mois, peut-être moins, je serai en mesure de mettre au monde de nouveaux Voltaire. Pour le plus grand bien de l'Humanité qui en a tant besoin. » Le roman change à nouveau de direction, explorant les coulisses des recherches sur le clonage humain. Et Attias, tout en multipliant les interrogatoires, n'avance pas d'un millimètre.

En désespoir de cause il demande conseil à quelques intellectuels et faiseurs d'opinion. C'est la partie la plus jouissive du roman car Franck Nouchi n'est pas tendre pour les BHL, Sollers, Alain Minc et autres Plenel. Et on doit admettre dans son sillage que les penseurs de notre époque sont bien ternes en comparaison de Voltaire. C'est un peu la morale de cette histoire sans fin : un grand homme l'est surtout par son unicité. Celui du XXIe siècle n'est pas encore connu. A moins que cette histoire de clonage ne se réalise un jour...

« Le cerveau de Voltaire » de Franck Nouchi, Flammarion, 18 € (disponible également au format poche chez J'ai Lu) 

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