lundi 14 novembre 2016

De choses et d'autres : Facebook s'offre quelques petites morts éphémères

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D’un coup d’un seul, deux millions de personnes sont passées de vie à trépas durant quelques minutes vendredi dernier. Un décès éphémère et heureusement virtuel, uniquement sur Facebook.
En tête des profils touchés, un petit mot de condoléances tout à fait dans le ton du réseau social : « En souvenir de (nom du titulaire de la page), nous espérons que ceux qui aiment (prénom) trouveront du réconfort en voyant ce que d’autres partagent en hommage à sa vie. » Certains ont donc découvert qu’ils étaient considérés comme morts. Drôle de surprise que ces « petites morts éphémères » ? « Une terrible erreur » de la société selon les explications des responsables de la communication.
La fonctionnalité « En mémoire » n’est déclenchée que si Facebook est informé de la disparition d’une personne par sa famille et uniquement après que cette dernière ait présenté une preuve du décès. Deux millions de morts d’un coup signifient forcément un gros bug quelque part.
À moins que ce coup d’éclat ne soit l’œuvre d’un pirate car dans le lot des tré- passés figure le fondateur de Facebook. J’imagine le hacker acnéique, terré dans son trou sombre, repu de hamburgers et ricanant telle une hyène au moment de détourner cette fonctionnalité et de l’appliquer à ce Mark Zuckerberg honni, tant à cause de ses milliards que de sa propension à se considérer comme le maître du monde. Ce qu’il est peut-être un peu avec son droit de vie ou de mort sur tous les membres de son réseau. 

BD : Le nouvel Ulysse est une femme

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A l’heure des romans graphiques trop souvent au dessin bâclé par manque de temps, saluons les 272 pages des « Voyages d’Ulysse » écrites par Sophie Michel et dessinées par Emmanuel Lepage avec l’adjonction de tableaux et esquisses de René Follet. Jules Toulet, jeune peintre sans le sou, voyage dans la Méditerranée. Il embarque sur le navire de Salomé dont le port d’attache est Santorin en Grèce. La jeune femme recherche un peintre, un certain Ammôn, spécialisé dans les représentations des classiques grecs. Cette belle histoire où Lepage est Toulet et Ammôn, Follet, son maître dans la vraie vie, est aussi celle d’une femme qui se comporte comme un homme dans un monde très machiste. On pourrait rester de longues minutes devant chaque dessin, planche et esquisse tant les deux illustrateurs sont talentueux. Des originaux que l’on peut admirer jusqu’au 16 novembre à la galerie Daniel Maghen, 47 quai des Grands-Augustins, à Paris
➤ « Les voyages d’Ulysse », Daniel Maghen éditions, 29 €


dimanche 13 novembre 2016

BD : Les Tuniques Bleues, entre 60e album et hommage des nouvelles générations


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60 ! Le compte est bon. Le 60e album des Tuniques Bleues vient de paraître. Lambil et Cauvin continuent la saga de Blutch et Chesterfield avec une régularité parfaite. Malgré l’âge, 78 ans pour le plus jeune, 80 pour le plus âgé. Alors certes on ne retrouve plus la fraîcheur et l’humour du début, mais le côté madeleine fonctionne parfaitement. D’autant que « Carte blanche pour un Bleu » donne l’occasion à Blutch de revisiter quelques décors cultes et retrouver des personnages marquants. Le tout pour rendre la mémoire à un Chesterfield devenu amorphe depuis une énième charge.

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On peut lire ce 60e titre en parallèle avec le recueil d’histoires courtes réalisé par quelques « jeunes » des éditions Dupuis. Des versions comiques (Sti, Dutto, Pau, Munuera) d’autres plus réalistes et sombres comme cette charge contre l’esclavagisme de Schwartz ou la protection des Indiens par Renaud Collin. Des hommages comme pour mieux prendre conscience de la richesse de cet univers qui a débuté en 1968 dans les pages du journal Spirou, soit bientôt un demi-siècle.
➤ « Les Tuniques bleues » (tome 60), Dupuis, 10,60 €
➤ « Des histoires courtes des Tuniques Bleues par… », Dupuis, 19 €


DVD et blu-ray : Un peu d’horreur pour les fêtes avec « Krampus » et « The Darkness »

Halloween vient à peine de mourir de sa belle mort dans une crise de foie carabinée (merci les bonbons) que les fêtes de fin d’année pointent le bout de leur nez. Saint-Nicolas, Noël, jour de l’An : il y en aura pour tout le monde. Et pour frissonner pour une bonne raison (en clair, la crise ne nous permet plus de payer la facture d’électricité), regardons sans scrupule ces deux films d’horreur, aux effets soignés et aux ressorts parfois pré- visibles mais toujours efficaces.
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Le « Krampus » est une création de l’imaginaire autrichien. L’ombre de Saint-Nicolas ne vient pas chez les petits enfants pour récompenser, mais pour punir. Le film de Michael Dougherty avec Adam Scott et Toni Collette débute comme une comédie un peu borderline. La famille modèle américaine doit accueillir les cousins, beaucoup moins présentables. Choc de civilisations qui fait bien rire durant les 20 premières minutes. Ensuite, l’angoisse prend le dessus. Une tempête de neige s’abat sur le quartier résidentiel et tout le monde est piégé dans la maison. Le Krampus attend que le feu s’éteigne pour passer par la cheminée et tuer tout le monde. Il reçoit l’aide de quelques marionnettes démoniaques, d’elfes terrifiants et de biscuits de Noël au rire sardonique. Les effets spéciaux sont remarquables et le Krampus véritablement effrayant avec ses cornes, ses sabots et ses lourdes chaînes. Un bon moment à regarder au chaud, entre copains voire en famille, avec au final un succulent bêtisier preuve que même sur le tournage des films d’horreur on aime faire des farces et bien rigoler...
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Ambiance totalement différente dans « The Darkness », production US de Greg McLean avec Kevin Bacon en vedette et non sorti en salles. Mais on retrouve quand même la structure familiale américaine classique avec un couple et ses deux enfants, une fille et un garçon. La différence réside dans la personnalité de Mickey : c’est un autiste qui passe ses journées à la maison malgré ses 11 ans. Mickey qui, lors d’un pique-nique dans le Grand Canyon, découvre dans une grotte, des pierres gravées indiennes. Attirées par leur beauté, il les met dans son sac à dos. Malheur ! Ce sont les prisons virtuelles de démons qui cherchent à entraîner le monde dans les ténèbres. L’attitude de Mickey va changer et la famille se fracturer. La fille devient anorexique, la mère paranoïaque et le père devra faire d’énormes efforts pour ne pas céder aux avances d’une ravissante stagiaire. La fin du film, très prévisible, manque un peu de noirceur. Alors vous pouvez profiter dans les bonus d’une conclusion alternative. Avec les Américains, il semble que cela soit tout blanc ou tout noir. Car cette version non seulement s’achève très mal pour la famille mais en plus laisse entendre que ce n’est qu’un dé- but. Au moins on a le choix et ce n’est pas un de ces films français où le générique dé- bute alors qu’on attend encore la moindre action ou rebondissement...  
➤ « Krampus », Universal, 14,99 €
➤ « The Darkness », Universal, 14,99 €

samedi 12 novembre 2016

Polar historique : Intrigue à Prague dans "Le songe de l'astronome"


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Thierry Bourcy et François-Henri Soulié ont uni leurs plumes pour ce polar historique inédit se déroulant à Prague de 1601. L’empereur Rodolphe II a convié plusieurs personnalités à un repas pour que son astronome attitré, Tycho Brahé, présente sa théorie qui va à l’encontre de celle de Copernic. Sont présents une cantatrice aux formes voluptueuses, une noble anglaise et son mari cacochyme (en réalité c’est une redoutable espionne), un ambassadeur danois, un peintre flamand, un nain dévergondé, un représentant du Vatican, le médecin du roi et un autre astronome, plutôt copernicien.
Le château va se transformer en huis clos à la mort de Tycho Brahé. Le chef des gardes, Kassov, devra se transformer en enquêteur pour démasquer le coupable. Intrigue soignée, personnages étonnants, lieux mystérieux : tout dans ce roman est réussi.
➤ « Le songe de l’astronome », éditions 10/18, inédit, 7,50 €


De choses et d'autres : Précis de « gentillesses » politiques

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Le capitaine Haddock aurait fait un excellent homme politique. Du moins dans sa propension à insulter à tout-va à l’aide de jurons très imagés.
L’insulte en politique compte une longue histoire racontée avec force exemples édifiants par Bruno Fuligni dans un dictionnaire dont la nouvelle édition, « Spécial présidentielle 2017 », vient rafraîchir les mémoires. On ira avec délectation vers les entrées des possibles présidentiables comme Nicolas Sarkozy (« Pas méchant mais pas d’allure. En fait il est bien plus fade qu’on ne le croit » Ségolène Royal) ou Alain Juppé (« C’est Fabius en pire. Ce dernier avait un soupçon de sensibilité, l’autre je ne le pense pas » Nicolas Sarkozy).
Plus loin dans le temps, député puis sénateur des Pyrénées-Orientales, Jules Pams faisait les frais de la verve de Clemenceau : « Pams, ce n’est pas un nom, c’est un bruit ». On notera d’ailleurs qu’au début du XXe siècle, les insultes étaient très virulentes. De même le dénigrement antisémite n’était pas une légende, pour preuve les propos de Léon Daudet sur Léon Blum ou de Charles Maurras sur Abraham Schrameck, particulièrement nauséabonds.
➤ « Petit dictionnaire des injures politiques », L’Editeur, 19 €

vendredi 11 novembre 2016

Thriller : Il est des crimes impossibles à regarder

LA PRUNELLE DE SES YEUX. Ce thriller d’Ingrid Desjours entraîne le lecteur dans le monde sombre de la cécité.
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Entre Maya et Gabriel, le courant passe immédiatement. La jeune fille, Française installée en Irlande, cherche un nouveau travail. L’homme, la cinquantaine triomphante, profite de sa fortune pour visiter l’île. Mais il a besoin d’un guide car il est aveugle. Le roman d’Ingrid Desjours débute comme une gentille comédie. La guide avenante, le beau malvoyant, généreux et passionnant. Ils poursuivent leur collaboration en France, dans divers lieux de province.
En parallèle à ces scènes presque bucoliques, la romancière raconte l’entrée d’un adolescent dans une école supérieure. Une boîte privée qui « fabrique » les futurs dirigeants du pays. Mais il ne s’intègre pas. Il est en réalité infiltré comme journaliste en devenir pour dénoncer les pratiques de bizutage. On comprend rapidement que Gabriel est le père du jeune garçon. Que ce dernier est mort assassiné et que c’est de ce jour qu’il est devenu aveugle. Une pathologie rare, la cé- cité de conversion. En clair, les yeux fonctionnent parfaitement, mais le cerveau refuse de convertir ces images, le plus souvent après un profond traumatisme psychologique.
Construit avec une précision chirurgicale, le roman alterne scènes dans l’école, quelques jours avant la nuit tragique, et piège présent qui se referme sur Maya. Car Gabriel est persuadé que c’est cette jeune femme, pourtant charmante avec lui, dont il pourrait presque tomber amoureux, qui est la responsable de la mort de son unique enfant. 
➤ « La prunelle de ses yeux », Ingrid Desjours, Robert Laffont, 20 € (« Les Fauves », précédent roman d’Ingrid Desjours vient de sortir en poche chez Pocket)

jeudi 10 novembre 2016

Cinéma : L’insécurité sévit aussi en Iran selon "Le client", film primé à Cannes


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LE CLIENT. Sélectionné à Cannes et doublement primé, en course pour les Oscars, le nouveau film d’Asghar Farhadi raconte la vie quotidienne en Iran, entre problème de logement et insécurité.


Prix du scénario et prix d’interprétation masculine à Shahab Hosseini, Asghar Farhadi, une nouvelle fois, n’aura pas fait le voyage pour rien au dernier festival de Cannes. Déjà primé à Cannes pour « Le Passé » en 2013, il avait connu la consécration internationale en 2011 avec «Une séparation », Ours d’or à Berlin et Oscar du film étranger. En grand habitué des festival, il a pourtant tourné « Le client » en raison du blocage temporaire de son grand projet espagnol avec Penelope Cruz et Javier Bardem. Mais visiblement ce retour au pays («Le Passé» avait été tourné en France) l’inspire. Il filme la ville de Téhéran avec une grande acuité. Une ville tentaculaire, en pleine mutation.
C’est d’ailleurs le point de départ de l’histoire. Un matin, tous les habitants d’un immeubles doivent évacuer la bâtisse. Des travaux dans la rue ont fragilisé les fondations, les murs se fissurent, les vitres éclatent. Emad (Shahab Hosseini) et Rana (Taraneh Alidoosti), jeune couple, doivent eux aussi trouver un autre logement. Ils sont hébergés par des amis puis une connaissance d’Emad, professeur qui fait également du théâtre, lui propose un appartement dans un ensemble moderne. Seul problème, une pièce est toujours occupé par les affaires de l’ancienne locataire. Un soir, quelqu’un pénètre dans l’appartement et agresse Rana.
■ Réalité iranienne
Au ton intimiste et réaliste, ce film donne une vision bien différente de l’Iran trop souvent fantasmé par l’Occident. Les gens y vivent, s’aiment et parfois souffrent exactement pour les mêmes raisons que chez nous. Il y a certes quelques notes diffé- rentes comme cette énième réunion avec les autorités pour « couper » certains passage de la pièce que la troupe d’Emad joue. Un classique contemporain pourtant, « Mort d’un commis voyageur » d’Arthur Miller. Quand Emad découvre l’agression de sa femme, il n’a qu’une idée en tête : se venger. Trouver le coupable et faire justice.
La piste va le conduire vers l’ancienne locataire et les clients qu’elle recevait chez elle. Une partie enquête policière oppressante, en parallèle au retour à la maison de Rana, terrorisée, incapable de rester seule dans ces murs. Mais il semble si difficile de se loger à Téhéran.
Asghar Farhadi, avec un recul étonnant, montre des faits sans jamais juger. Il laisse ce luxe à ses interprètes. Si Shahab Hosseini est impressionnant de détermination, la composition de Taraneh Alidoosti est éblouissante. Et on découvre que la prétendue violence de la société iranienne ne semble pas s’appliquer à tout le monde. A moins que le pardon soit une valeur sacrée partagée par toutes les religions. On sort cependant du film avec un certain malaise. Comme si l’agression était excusable, presque normale. On veut bien tenter de comprendre une mentalité différente, mais dans ce cas, jamais on ne pourra se mettre à la place d’une femme iranienne.

De choses et d'autres : Trump à la Maison Blanche, vers quatre ans de téléréalité

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J’avoue, jamais je n’aurais cru en arriver à écrire une chronique sur l’élection de Donald Trump au poste de président des USA. Et pourtant... Comme la grande majorité des sondages et des « analystes » politiques, je ne misais pas un centime sur ce milliardaire démagogue et populiste. Perdu !
Enfin ce n’est pas moi directement qui ai perdu quoi que ce soit. Par contre les hispaniques, les femmes, les noirs, les musulmans et d’une fa- çon plus générale tout ce qui n’est pas blanc, mâle et plutôt riche, risquent de vivre quatre années terribles. La présidence Trump a toutes les chances de s’apparenter à une longue, très longue, émission de téléréalité. Car le personnage, sorte de bateleur de l’ère 2.0, semble toujours avoir une idée pour repousser les interdits, aller plus loin dans le trash. Trump au pouvoir c’est Nabilla, sans téléphone mais avec le doigt sur le bouton qui déclenche le départ des ogives nucléaires dirigées sur celui qu’il veut « éliminer » du prochain épisode.
A moins qu’il n’ait fait tout cela que pour la gloriole. Un caprice de gosse de riche qui prend le pari qu’il deviendra président des USA. Son dernier challenge. Une fois ce Graal atteint, espérons que la raison lui reviendra, qu’il ne fera pas trop de de bêtises avec ses nouveaux joujoux.
Le dernier mot revient au cinéaste Michael Moore quand il tweete, quelques minutes après le résultat, « Quelle que soit l’issue, c’est ainsi que tout a commencé ».

mercredi 9 novembre 2016

De choses et d'autres : Frites à volonté !


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Cette primaire de la droite commence à me plaire. Partie sagement, avec respect et sujets sérieux, elle s’emballe depuis le débat de la semaine dernière. Les outsiders - Copé, Le Maire et NKM - ont sorti les ergots pour tenter de griffer la carapace des vieux durs à cuire et essayé de déstabiliser Nicolas Sarkozy et Alain Juppé.
Et puis il y a les meetings. Comme s’il avait déjà oublié l’affaire Bygmalion, Nicolas Sarkozy les enchaîne à tour de bras. Parfois on se demande si l’épuisement ne le guette pas quand il affirme, en réponse aux parents d’enfants qui ne veulent pas de porc à la cantine, qu’il suffit de servir aux gamins « une double ration de frites ».

Les frites à la cantine. Quels bons souvenirs. Ce n’était pas tous les jours malheureusement. Et il y avait rarement du « rabe ». Si j’avais 40 ans de moins, j’envierais presque les petits juifs et musulmans de la France de Sarkozy. « Allah est grand, un peu plus de frites s’il vous plait ».
Cette histoire de « double ration de frites » résume la campagne des primaires. Pourquoi se casser la tête à trouver des solutions compliquées quand on peut faire simple ? Pas assez de policiers ? On embauche. Trop de dé- ficit ? On vire des fonctionnaires (mais pas les policiers récemment engagés). L’agriculture va mal ? Obligation de faire pousser des patates. Faudra bien, puisqu’on ne mangera que des frites...