samedi 1 février 2014

Cinéma : Duel entre le cow-boy et le sida dans "Dallas Buyers Club"

Cowboy texan amateur de rodéo et de jolies filles, Ron Woodroof a créé le Dallas Buyers Club en 1986. Son but, trouver des remèdes alternatifs au sida.


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Des films sur le sida, il y a en des quantités. Des communautaires, des larmoyants, des alarmistes... Jean-Marc Vallée, réalisateur québécois, signe avec « Dallas Buyers Club » un de ces long-métrages coup de poing inoubliables, le film référence sur l'apparition de cette maladie du siècle. Une histoire forte portée par un acteur d'exception. Le visage émacié mais déterminé de Matthew McConaughey est le symbole de cette lutte sans fin contre un virus qui a profondément changé le mode de vie de millions d'êtres humains.
En 1986, le sida commence à peine à faire parler de lui. Pourtant la pandémie est en pleine progression. Le virus fait des ravages dans la communauté homosexuelle. Mais il se transmet aussi par les seringues des drogués et les relations sexuelles non protégées. Ron Woodroof se croit à l'abri, lui qui ne supporte même pas la vue d'un gay. Ron, simple électricien, amateur de jolies filles et de rodéo dans ce Texas profond, raciste et macho. Après une électrocution sur un chantier, il se réveille dans un hôpital. Les médecins, sans trop de ménagement, lui annoncent qu'il est porteur du virus HIV. Et vu l'avancement de la maladie, il ne lui reste que 30 jours avant de mordre la poussière. Définitivement.

Les ravages de l'AZT
Pour Ron, c'en est trop. Il quitte l'hôpital avec pertes et fracas (la scène se reproduira à plusieurs reprises) offusqué d'être assimilé à des pratiques sexuelles qu'il abomine. Durant quelques jours il va vivre sans limites, profitant de cet arrêt maladie pour faire la fête, forniquer, boire et sniffer un maximum de cocaïne. Un déni qui ne durera pas. Évanouissement, impuissance, toux persistante : les symptômes sont là. OK, il a le sida, mais n'a pas l'intention de mourir si vite. Ron va prendre le taureau par les cornes et chercher le meilleur médicament. Il fera tout pour obtenir de l'AZT, une molécule en période de test.


L'électricien sans bagage éducatif va devenir expert en recherche médicale. Après un nouveau bref séjour à l'hôpital qu'il quitte cul nu en beuglant « Je préfère crever les santiags aux pieds ! », Ron va tenter un nouveau protocole à base de médicaments moins destructeurs que l'AZT. Problème, il ne sont pas autorisés par l'agence fédérale des médicaments, la FDA. Ainsi naitra le Dallas Buyers Club, une association qui distribue aux séropositifs des soins alternatifs au détriment de l'AZT, seul traitement autorisé aux USA.
La moitié du film est consacrée à la bataille entre Ron et la FDA. Mais ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Le vrai combat, c'est contre la maladie qu'il le mène. Et sa bêtise. Face à l'adversité, il va changer, se bonifier intellectuellement au même rythme que son physique décline. Il deviendra tolérant, notamment envers les Gays dont il découvrira toute l'humanité en côtoyant Rayon (Jared Leto), ange transsexuel fauché par la maladie. Comprendra mieux les médecins aussi grâce à sa relation avec le docteur Eve Saks (Jennifer Garner), passant de la drague poussive à l'amitié féconde. Mais ce qui reste du film, c'est la performance d'acteur de Matthew McConaughey déjà primé aux Golden Globes et très bien placé pour l'oscar. Un rôle physique (il a perdu 22 kilos pour être Ron) mais qui passe aussi par d'innombrables gros plans sur son visage creusé, veines saillantes et yeux vitreux. Il souffre, mais en cow-boy habitué à l'adversité, il ne cède jamais et poursuit son duel jusqu'au bout du bout.
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Éblouissant Jared Leto

Si Matthew Mcconnaughey éclabousse de son talent le film de Jean-Marc Vallée, il n'est pas le seul à tétaniser le spectateur. Jared Leto, dans la peau du transsexuel séropositif Rayon, marque lui aussi les esprits. Le jeune acteur américain, révélé dans la série pour adolescents « Angela, 15 an », passé par la scène rock, retrouve enfin un rôle à la mesure de sa formidable propension à habiter un personnage.

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On se souvient de sa composition dans « Fight », performance balayée par sa métamorphose en « folle » mise au ban de sa famille. Maquillé ou au naturel, il est d'une beauté à couper le souffle. Ron, cowboy macho, le rejette au premier contact (ils partagent la même chambre d'hôpital). Il retournera vers lui quand il mettra sur pied sa petite entreprise de revente de médicaments non homologués. Au début des années 80, 90 % des malades du sida étaient homosexuels. Pour toucher cette clientèle, il « embauchera » Rayon en lui cédant 25% des bénéfices. Ensuite ce sera l'aventure du Dallas Buyers Club, moins mercantile. Rayon s'installe avec Ron, une quasi vie de « couple » pour ces deux personnalités que tout sépare si ce n'est ce foutu virus. Cela donne une scène emblématique de l'évolution de Ron. Alors qu'il est au supermarché en train de faire ses courses, il croise un de ses anciens collègues. Lui aussi carbure au rodéo, à l'alcool et à la stigmatisation des homos. Repérant Rayon, il fait remarquer à Ron qu'ils sont de plus en plus sans gène. Ron présente alors Rayon à l'intolérant, l'obligeant à lui serrer la main. Jared Leto, entre feu follet papillonnant à l'excès et gamin perdu, angoissé à l'idée de la mort, apporte une dimension mélodramatique supplémentaire à un film résolument optimiste.

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